O grand pays religieux, Pavé de pierres sépulcrales, Un jour sombre te vient des cieux Par des vitraux de cathédrales ! ... Vous avez peut-être passé Dans le sentier des primevères. Sur l'horizon, plane, dressé, Le groupe noir des « Cinq Calvaires ". Ils sont là cinq...
A André Bénac Ce qui me charme en toi, Quimper de Cornouailles, C'est qu'une âme rustique imprègne ta cité, Que les champs sont chez eux au cœur de tes murailles Et que, né paysan, ton peuple l'est resté. Tes rivières te font un collier de sonnailles Et dans leurs...
Du temps que j'étais écolier sauvage En un vieux collège aux livres moisis, S'en vint jusqu'à moi, s'en vint une page D'un recueil tout frais de « Morceaux choisis ». Comme l'eau d'avril au creux des fontaines, Ainsi le printemps riait dans ces vers. Je lus - et je...
A François Gélard J'ai dans l'âme un vieux sanctuaire Aux trois quarts, hélas ! ruiné, Où, sur un pauvre autel de pierre, Des fleurs achèvent de faner. J'ai dans l'âme un vieux sanctuaire... Voilà beau temps qu'on n'y vient plus, Au matin, dire la prière Et, le soir,...
L'étang mire des fronts de jeunes lavandières. Les langues vont jasant au rythme des battoirs, Et, sur les coteaux gris, étoilés de bruyères, Le linge blanc s'empourpre à la rougeur des soirs. Au loin, fument des toits, sous les vertes ramées, Et, droites, dans le...
L'automne est la saison dolente. L'âme des labours assoupis Berce d'une hymne somnolente L'enfance des futurs épis ; Et, triste, la mer de Bretagne Se prend à gémir, dans le soir. Par les sentiers de la montagne, Commence à rôder le Mois Noir. Et les cloches ont l'air...
Elle est couchée en son lit clos ; Elle dort, elle dort, Tryphine ! Aussi blonds que la paille fine, Ses cheveux coulent à longs flots Sur la nacre de sa poitrine. Et la cuisine vaste est pleine de sanglots !... On a pour la veillée invité les fileuses ; Par les...
Sur les coteaux pâlis flotte une ombre indécise : Au portail de la ferme une femme est assise, Qui, d'un refrain breton vaguement fredonné, Dans ses bras arrondis berce son premier-né ; Sous le corsage étroit où s'amincit son buste Pointent deux jeunes seins, gonflés...
Barque échouée au bord des rivages bretons, J'ai désappris l'essor de mes jeunes sillages Et laissé, sur mes flancs, se nouer en festons Vos scalps souillés d'écume, ô goémons des plages. Il ne m'importe plus si d'autres les refont, Mes croisières d'antan, mes belles...
C'est un soir d'octobre, à Beg-Meil. Par les marches de l'étendue, Rouges encor d'un sang vermeil, La nuit pieuse est descendue Pour ensevelir le soleil. De ses mains ferventes et pures, Elle a couché l'astre vital Dans les somptueuses guipures Du grand linceul...
Sur un front lisse et pur, finement épinglée, Tu m'évoques ma mère, ô coiffe du Trégor, Et, dans ta conque frêle avec art ciselée, C'est toute la chanson de mon passé qui dort. Comme tu palpitais, pudique, à la veillée, Sur quelque nuque mince aux chastes frisons d'or...
A Reine-Anne Voici venir vers nous le soir aux yeux de cendre, Clairs encor d'un reflet de la braise du jour Dans le couchant d'août, ma mie, allons l'attendre, Parmi l'or pâlissant de notre été d'amour. Nous lui dirons : « Sois pur, soir pacifique et tendre,...
A Madame E.B. Un soir que vous rêviez assise au bord des grèves Vint s'étendre à vos pieds un harpeur de Quimper. Les rêves qu'il chantait ressemblaient à vos rêves Comme le bruit des pins aux rumeurs de la mer. Il disait la beauté de la terre océane, Son sortilège...
Ils avaient dit bonsoir aux femmes En train de coucher les petits ; Et, sur le dos mouvant des lames, A la brune, ils étaient partis. Ils étaient partis, à mer haute, Pour conquérir le pain amer Qu'il faut gagner loin de la côte, Au péril de la haute mer. Dans la...
Monna Keryvel met pour aller paître, Pour aller, aux champs, paître ses brebis, Avec sa croix d'or qu'a bénite un prêtre, Monna Keryvel met ses beaux habits. Un doux cavalier s'en vient d'aventure Il a " bonjouré " Monna Keryvel ; C'est un fils de noble, à voir sa...
De qui surveillait-il les troupeaux ? On ne sait. Mais, chaque soir, à l'heure où le soleil baissait, Sur le Roc-Trévézel on le voyait paraître, Debout, dans l'attitude immobile d'un prêtre En oraison devant l'Esprit de ce haut-lieu... Le couchant s'éteignait dans le...
Drapée en sa cape de veuve, S'efface à pas discrets la nuit Voici poindre la clarté neuve De l'aube qui s'épanouit. Elle promène sur les choses Son beau regard silencieux Et la mer se jonche de roses Sous la caresse de ses yeux. Pour son adorable venue Le désert du...
A Pauline Ménou Dans la nuit noire, recourbée en nef d'église, S'inscrivent, par instants, des pâleurs de vitraux Qu'une clarté de lune intermittente irise : Un vent religieux frissonne sur les eaux. Au large de l'Ar-Men solitaire, agonise L'âme, lente à sombrer, des...
A madame Adolphe Graff Le ciel s'éteint, tout va dormir Je songe à des choses passées ; C'est à la fois peine et plaisir. La veilleuse du souvenir S'allume au fond de mes pensées. J'entends des pas, j'entends des voix, Des pas furtifs, des voix lointaines C'est peine...
A Maggie Octobre m'apparaît comme un parc solitaire : Les mûres frondaisons commencent à brunir. Et des massifs muets monte une odeur légère, Cet arôme plus doux des fleurs qui vont mourir. L'étang, les yeux voilés, rêve, plein de mystère, Au fantôme ondoyant de...