Voici le meilleur de la poésie d'Antoine-Vincent Arnault. La feuille - Antoine-Vincent Arnault — De ta tige détachée,Pauvre feuille desséchée,Où vas-tu ? — Je n'en sais rien.L'orage a frappé le chêneQui seul était mon soutien.De son inconstante haleine,Le zéphyr ou...
Fable XI, Livre III. Le vent s'élève ; un gland tombe dans la poussière : Un chêne en sort. — Un chêne ! Osez-vous appeler Chêne cet avorton qu'un souffle fait trembler ? Ce fétu, près de qui la plus humble bruyère Serait un arbre ? — Et pourquoi non ? Je ne m'en...
Fable III, Livre V. « Tu bourdonnes, n'es-tu pas libre ? » Disait un écolier au hanneton fâché D'avoir toujours un fil à la patte attaché. Ainsi parlait Octave à ses sujets du Tibre. Ainsi naguère encor j'entendais raisonner D'honnêtes gens, qui tous n'étaient pas sur...
Fable V, Livre II. Plus galant que sensé, Colin voulut jadis Réunir dans son champ l'agréable à l'utile, Et cultiver les fleurs au milieu des épis, Rien n'était, à son gré, plus sage et plus facile. Parmi les blés, dans la saison, Il va donc semant à foison Bluets,...
Fable I, Livre V. « On suivait Paul hier, on le fuit aujourd'hui. Me direz-vous, monsieur, à quelle circonstance Il faut imputer l'inconstance Que le public montre envers lui ? » Après un moment de silence, Monsieur l'abbé répond : « Mets d'abord, mets, mon fils, « Ce...
Fable IX, Livre II. Au temps où les bêtes parlaient Non pas hier pourtant, un grave personnage, Un dindon, le Nestor des dindons de son âge, Elevait quinze enfants, qui tous lui ressemblaient. Tous, j'ai tort ; car l'un d'eux, et la chose est prouvée, Éclos de la même...
Fable XV, Livre II. « Que fais-tu donc en ce bourbier, Où je te vois vautré sans cesse ? » Au pourceau disait le coursier. « Ce que j'y fais ? parbleu ! j'engraisse ; Et tu ne ferais pas très mal, Poursuivait l'immonde animal, D'en faire autant : parfois la guerre...
Je vois bien l'arbre aux pommes d'or Prospérer dans vos prés humides ; Mais cela n'en fait pas encor Un vrai jardin des Hespérides. La timide sécurité N'avait pas de plus doux asile Que le verger riche çt tranquille, Par les fils d'Atlas habité. Loin du loup, la...
Fable IX, Livre IV. Prétendons-nous au même office ;Aspirons-nous au même objet,Sous-lieutenance ou bénéfice,Trône ou fauteuil ; en ce projet,Mes bons amis, que Dieu nous serve !Mais, comme entre nous tous il n'en peut servir qu'un,D'un travers, dès longtemps...
Fable VI, Livre II. Le crocodile en pleurs, aux animaux surpris, De la pitié vantait les charmes : « Craignez ceux qui jamais ne se sont attendris ; Fiez-vous à quiconque a répandu des larmes : Frères, l'homme est croyable, et l'homme pense ainsi. » « — Je le sais,...
Fable I, Livre I. L'olive, aux champs, n'est pas ce qu'elle est sur la table ; Le premier qui, sur l'arbre, essaya d'en goûter, Fit une mine épouvantable ; Au feu voulut faire jeter Le tronc qui produisait un fruit si détestable. Mieux vaut le cultiver, lui dit la...
Fable II, Livre III. Médor est un vrai chien de race,Des mieux nés et des mieux appris ;Il n'a pas d'égal, soit qu'il chasseLièvre ou lapin, caille ou perdrix.Le maître aussi jamais ne va battre les plaines,Fouiller ses bois et ses garennes,Qu'à le suivre Médor n'ait...
Fable IX, Livre I. Voilà nos champs bien préparés, Bien engraissés, bien labourés ; Ensemençons sans plus attendre. Mon fils, ne perds pas un moment : Tu vois bien ce sac de froment ; Dans nos sillons va le répandre. Tout entier ? — Depuis quarante ans, Du blé que je...
Fable VI, Livre V. Quelques brochets jetés dans nos étangs N'y sont pas tout-à-fait nuisibles. Craints des poissons de tous les rangs, Mais au fretin lui seul terribles, S'ils vivent des petits, ils font vivre les grands. Des avortons, sans cesse, engloutissant la...
Fable VIII, Livre IV. Pour complaire aux goûts innocents Des grands et des petits enfants, De pauvres baladins allaient de foire en foire, Représentant les faits les plus intéressants Ou de la fable ou de l'histoire. Ressuscitant les vieux héros De l'Italie et de la...
Fable X, Livre II. Naguère un ours encor sauvage, Ours sans esprit et sans usage, Mais non pas sans ambition, Disait : « Je veux aller à la cour du lion. Pour plaire en entrant là comment faut-il que j'entre ? » Le singe dit, « C'est en sautant ; » Le sansonnet, «...
Fable XI, Livre I. Un bon chien de berger, au coin d'une forêt, Rencontre un jour un chien d'arrêt. On a bientôt fait connaissance. À quelques pas, d'abord, on s'est considéré, L'oreille en l'air ; puis on s'avance ; Puis, en virant la queue, on flaire, on est flairé...
Fable VIII, Livre I. Quoi ! je ne me vengerais pas De cette maudite vipère ! Disait un lézard a son père. Pourquoi fuirais-je les combats ? Au triomphe je puis prétendre ; N'ai-je pas des ongles, des dents ? II est mal d'attaquer les gens ; Mais il est bien de se...
Fable V, Livre III. Tous les jours on voit des marmots, Avec un peu de vent gonfler un peu d'écume ; Tous les jours, avec de grands mots, Pour l'heureux du moment maint sot fait maint volume. Mes amis, retenez-le bien, Le pouvoir de l'homme est immense : Tirer quelque...
Fable VI, Livre IV. Or çà, mes amis, essayonsDe vous redire en vers tout ce que la chandelleDisait naguère en prose, en voyant ses rayonsPorter jusqu'à six pas la lumière autour d'elle.« Ce n'est pas tout-à-fait la clarté du soleil,Et je n'éclaire pas une sphère aussi...
Sans craindre qu'un rival contre mes droits conspire, Je suis le souverain de tout ce que je vois : De l'une à l'autre rive, et les airs et les bois Sont peuplés des sujets de mon paisible empire. Toi que du sage a trop vanté l'amour, Solitude, où sont donc tes...
Fable II, Livre IV. A. Epargne ce pauvre animal. B. Un bâton fera son affaire. A. Mais il ne t'a fait aucun mal. B. A tant d'autres il vient d'en faire ! A. La douleur se peint dans ses yeux. B. Ne t'y trompe pas, c'est la rage. A. Et puis, regarde, il est si vieux !...
Fable XIII, Livre I. Un lièvre avait son gîte auprès de la tanière D'un maussade et vieux hérisson. Chacun, de son côté, vivait à sa manière, À l'abri du même buisson, Quand une taupe y vint creuser sa taupinière. Entre les gens de certaine façon, Nous savons tous...
Fable XIII, Livre V. Entre nos frères les meuniers Et nos frères les charbonniers J'ai vu régner longtemps une haine assez forte. À quel propos ? C'était... que le diable m'emporte, Si plus qu'eux-mêmes je l'ai su ! Eh ! n'est-ce pas souvent pour un malentendu Qu'un...
Fable XVII, Livre IV. Une ourse avait mis bas ; ourses du voisinage D'accourir pour voir le poupon. « Est-ce une fille ? Est-ce un garçon ? Est-il bien gros ? Est-il bien sage ? Sans que ce soit un damoiseau, Puisqu'il est le fils de son père, Comme un ange il doit...
Imitation de Pétrarque. Si ce n'est pas l'amour, quel feu bride en mes veines ? Ou quel est cet amour dont je me sens saisir ? Si c'est un bien, pourquoi cause-t-il tant de peines ? Si c'est un mal, pourquoi fait-il tant de plaisir ? Librement dans mon cœur si j'en...
Fable V, Livre I. Pataud jouait avec Raton, Mais sans gronder, sans mordre ; en camarade, en frère. Les chiens sont bonnes gens ; mais les chats, nous dit-on ? Sont justement tout le contraire. Aussi, bien qu'il jurât toujours Avoir fait pate de velours, Raton, et ce...
Fable XII, Livre V. LA LOUVE. Rarement à changer on gagne. Pourquoi veux-tu courir les champs ? Crois-moi, reste sur la montagne. J'aime ces bois, j'aime les chants Que ce vieux pâtre y fait entendre. Son chien n'est pas des plus méchants. Plus prompt à fuir qu'à se...
Fable II, Livre V. Je suis un peu badaud, je n'en disconviens pas. Tout m'amuse ; depuis ces batteurs d'entrechats, Depuis ces brillants automates, Dont Gardel fait mouvoir et les pieds et les bras, Jusqu'à ceux dont un fil règle et soutient les pas, Jusqu'aux Vestris...
Fable IV, Livre III. Un dogue se battait avec un chien danois, Pour moins qu'un os, pour rien ; dans le temps où nous sommes, Il faut presque aussi peu, je crois, Pour diviser les chiens que pour brouiller les hommes. L'un et l'autre était aux abois ; Écorché par...
Fable XIII, Livre IV. A-t-on des puces, mes amis, Il faut songer à s'en défaire. Mais loin qu'il fût de cet avis, Certain barbet jadis faisait tout le contraire, Et du ton d'un riche, ou d'un grand Qui s'enorgueillirait des amis de tout rang, Dont toute bonne table en...
Fable XV, Livre III. Comme ce fournisseur, au visage vermeil, Rebondi, ramassé dans sa courte structure, Et brodé sur toute couture, Un melon étalait son gros ventre au soleil ; Et, du haut de sa couche, à la rave modeste Qui, dans le sable aride, à ses pieds...
Fable VI, Livre I. On nous raconte que Léda, Par le diable autrefois tentée, D'un amant à l'aile argentée, Un beau matin, s'accommoda. Hélas ! ces caprices insignes Sont encor les jeux des Amours ; Si ce n'est qu'on voit de nos jours Les Dindons remplacer les Cygnes....
Me demander si du plus froid des cœurs J'ai cru fléchir la longue indifférence ; Au seul plaisir si donnant quelques pleurs J'ai cru jouir du prix de ma constance ; Si, me berçant d'un penser si flatteur. Avec la peine un moment j'ai fait trêve ; Me demander si je...
Fable X, Livre V. — Lève une tête un peu moins haute, Toi qui n'es bon qu'à me chauffer. Tes fruits sont affreux. — C'est ta faute. Ne devais-tu pas me greffer ? Antoine-Vincent Arnault
Fable V, Livre IV. Don pourceau, lâché dans la plaine, S'émancipait à travers choux, Flairant, fouillant dans tous les trous, Et, dans l'espoir de quelque aubaine, Mettant tout sens dessus dessous. Du fait sa noble espèce est assez coutumière. Or donc, après avoir...
Fable XI, Livre II. Un jour, tout en philosophant, Tout en promenant ses pensées, Une bête des plus sensées... Un homme ?... non, un éléphant, D'un mulot sous ses pieds rencontra la retraite. La voûte ici n'était pas faite Pour porter un tel poids : comme on l'a...
Fable XII, Livre III. Ces dés qui, chassés d'un cornet Pour être agités dans un autre, Par un canne ou par un sonnet Règlent ma fortune et la vôtre ; Ces dés tout écornés, n'en retracent que mieux Le sort d'un pauvre peuple aux mains des factieux ; Par l'intérêt des...
Fable XVII, Livre V. Polichinelle, à toi nous voilà revenus. J'y reviens volontiers, c'est un ami d'enfance ; Garçon d'esprit d'ailleurs, dans son extravagance, Fertile en mots profonds, des badauds retenus ; Garçon d'humeur toujours égale, Non pas comme un quidam que...
Fable VII, Livre IV. — Tandis qu'en vain cet arbre utile Attend l'eau dont il a besoin, Pourquoi prenez-vous tant de soin De cet arbre ingrat et stérile ? — Mon ami, c'est qu'il vient de loin. Antoine-Vincent Arnault
Fable IV, Livre I. Sans ami, comme sans famille, Ici bas vivre en étranger ; Se retirer dans sa coquille Au signal du moindre danger ; S'aimer d'une amitié sans bornes ; De soi seul emplir sa maison ; En sortir, suivant la saison, Pour faire à son prochain les cornes...
Fable XII, Livre II. Un jeune enfant n'avait pas remarqué Certain Frelon qui pillait un parterre ; Comme un auteur surpris par le folliculaire, Au milieu de ses jeux, zeste, il se sent piqué, Au moment qu'il n'y pensait guère. Comme un auteur, il jette les hauts cris....
Fable XVII, Livre III. Deux dindons s'engraissaient dans une métairie ; Égaux en droits : l'un d'eux croyait pourtant valoir Bien plus que son confrère. Hé pourquoi, je vous prie ? Parce qu'il était blanc, et que l'autre était noir. Aussi Dieu sait quels droits à la...
Fable VII, Livre III. « Au diable soient les étourdis Qui m'ont fait une horrible tache !... Qu'ai-je dit, une ? en voilà dix ; Et c'est à mon velours pistache ! » Ainsi parlait monsieur Denis, Marchand fameux dès l'ancien règne, Marchand connu de tout Paris, Marchand...
La rose humide et vierge encore, Que l'aube embellit de ses pleurs, N'est pas plus fraîche que les fleurs Que votre pinceau fait éclore. On vante la voix et les chants De la plaintive Philomèle : Vos airs ne sont pas moins touchants, Et vous chantez aussi bien...
Fable III, Livre II. À ma femme Sophie. Que j'aime le colin-maillard ! C'est le jeu de la ville et celui du village ; Il est de tout pays, et même de tout âge ; Presque autant qu'un enfant il égaye un vieillard. Voyez comme il se précipite, Sans penser même aux...
Fable XV, Livre I. Pauvre Turc ! qu'il est bon ! le charmant caractère ! S'écriait un enfant en promenant sa main Sur un dogue enchaîné qui, dit-on, par dédain, Impunément le laissait faire. Vilain Fox ! comme il est méchant ! Dit un moment après le même personnage,...
Fable III, Livre IV. Madame était au bal, monsieur était au jeu, Et leurs gens, comme on l'imagine, Sur le poêle assoupis, s'inquiétaient fort peu D'une pincette de cuisine, Par eux, dans le salon, laissée au coin du feu. Mais la pincette de leur maître, Noble...
Fable XVIII, Livre III. Toi, chez qui tant de sens à tant d'esprit s'allie, Chez qui les préjugés n'ont jamais eu d'accès ; Toi qui fuis en tout les excès, En tout, même en philosophie ; Lis ce court apologue où je crois, j'en conviens, Peindre les sentiments dont...
Fable XIII, Livre III. L'autre hiver, des badauds attroupés dans ma rue S'extasiaient devant une statue : C'était la reine de Paphos, Chef-d'œuvre qu'un artiste échappé du collège Avait tiré... — D'un marbre de Paros ? Non, lecteur ; mais d'un tas de neige. Le ciseau...
Fable XIV, Livre IV. « L'excellente caricature ! » Disait un jeune coq en riant aux éclats : Un chapon, malgré l'aventure Qui l'oblige au moins gai de tous les célibats, Vouloir être chef de famille ! De poussins quelle bande autour de lui fourmille ! S'il était...
Fable IV, Livre IV. À mes enfants. Du printemps la fille vermeille, La rose ne vit qu'un moment, Dont le papillon et l'abeille Profitent bien différemment. Gaspillant, comme un fou, les biens qu'on lui prodigue Tandis que l'insecte léger, Chenille un jour avant,...
Fable IV, Livre II. Dans l'Olympe on s'ennuie. — Y pensez-vous, grands Dieux ! — Oui, Messieurs ; oui, j'y pense, et je veux le redire : Dans l'Olympe on s'ennuie, ainsi qu'en d'autres lieux Qui souffrent peu le mot pour rire. Dieux d'en-haut, Dieux d'en-bas, vous...
Fable IX, Livre III. Dans une rue, au bord du moins clair des ruisseaux Etait un tas de neige auprès d'un tas de boue. Un carrosse a passé ; sous la quadruple roue, Du noir bourbier au loin j'ai vu jaillir les eaux. Au tas de boue en vain l'onde impure s'attache : Il...
Fable XVI, Livre II. Je ne sais quel despote aperçoit sa statue Le nez sur le carreau, dans la fange abattue. Jeune et prince, à juger il était un peu prompt. « La mort, la mort au téméraire Qui m'ose faire un tel affront ! Qu'il périsse à l'instant ! — Sire, c'est le...
Fable VIII, Livre III. Au milieu des forêts, sans trop user ma poudre, Mon fusil, rival de la foudre, Fait un bruit qui ne finit pas. En plaine, c'est tout autre chose : Du salpêtre infernal j'ai beau forcer la dose, Un court moment à peine on m'entend à vingt pas....
Déjà j'ai vu le verger Se parer de fleurs nouvelles ; Le Zéphyr, toujours léger, Déjà folâtre autour d'elles. L'hiver fuit ; tout va changer, Tout renaît : à ce bocage Le printemps rend le feuillage, Aux verts tapis leur fraîcheur, Aux rossignols leur ramage ; Et non...
Fable VII, Livre I. Qui découvre une vérité, A dit un grave personnage, La gardera pour soi, s'il est quelque peu sage Et chérit sa tranquillité. Socrate, Galilée, et gens de cette étoffe, Ont méconnu ce dogme, et s'en sont mal trouvés. Quels maux n'ont-ils pas...
Fable XIV, Livre III. Le zèbre débarque en Europe ; Les ânes d'admirer, et les savants aussi. « Le beau cheval que celui-ci ! » Disent nos connaisseurs qu'éblouit l'enveloppe. Le cheval, lui seul étonné, Prétend qu'à son espèce on ose faire injure. « Un cheval ! lui,...
Stances irrégulières. À Madame la princesse D'Hatzfeld. Le bonheur ici-bas tient à bien peu de chose. Vous ne l'ignorez pas ; vous savez, d'après vous, Que le sort au hasard porte souvent ses coups, Et que l'aquilon en courroux N'épargne pas même la rose. Aussi...
Fable VIII, Livre V. « Laridon, soit dit sans reproche, C'est un sot métier que le tien, » Disait un écureuil à certain citoyen Qui de son espèce était chien Et de son métier tournebroche. « Pardon, petit ami, pardon ; « Mais ce que tu dis là, répond le Laridon, « On...
Fable IX, Livre V. Fier de sa charge magnifique, Fier de porter, je ne sais où, Pour je ne sais qui, l'or du Chili, du Pérou, Et du Potose et du Mexique, Un gros vaisseau marchand revenait d'Amérique. Le joyeux équipage était des plus complets : Passagers, matelots,...
Fable X, Livre I. L'éponge boit, c'est son métier ; Mais elle est aussi souvent pleine De l'eau fangeuse du bourbier, Que de celle de la fontaine. Docteurs qui, dans votre cerveau, Logez le vieux et le nouveau, Les vérités et les mensonges, J'en conviens, vous retenez...
Fable XII, Livre I. Un médisant accusait les échos. Un médisant !....... Je le ménage. Le ciel, disait-il dans sa rage, Puisse-t-il les punir de leurs mauvais propos ! Que d'ennemis je dois à leur langue indiscrète ! Tout, jusqu'à mes moindres discours, Devient...
Fable XIV, Livre V. Sur la cire brûlante imprimons une image ; Elle s'y fixera d'autant plus fortement Que le cachet si mou dans le premier moment En se refroidissant se durcit davantage. Leçon pour nous : par un outrage Avons-nous blessé notre ami, Et du mal dont il...
À l'ami que je ne connais pas. Le dieu des arts, le dieu des versA souvent consolé ma peine ;Entre Voltaire et La Fontaine,Oui, j'oubliai plus d'un revers. Oui, grâce aux fruits de ma retraite,Mon nom est encor répétéAu doux pays que je regrette,Et dont je me sais...
Fable II, Livre II. Penses-y deux fois, je t'en prie ; À jeun, mal chaussé, mal vêtu, Pauvre diable ! comment peux-tu Sur un billet de loterie Mettre ainsi ton dernier écu ? C'est par trop manquer de prudence ; Dans l'eau c'est jeter ton argent ; C'est vouloir... —...
Fable IV, Livre V. Mes bons amis, je dois en convenir, Je n'imaginais pas qu'un mort pût revenir ; Que bien empaqueté, soit dans cette humble bière Des humains du commun la retraite dernière, Soit dans ce lourd cercueil dont le plomb protecteur Plus longtemps au néant...
Fable XI, Livre V. Après n'avoir rien pris de toute la semaine, Un pêcheur trouve une huître au fond de son filet : « Rien qu'une huître ! voyez, dit-il, la bonne aubaine, » En la jetant sur le galet. Comme il s'en allait, l'huître bâille, Et découvre à ses yeux...
Fable X, Livre IV. « Ma sœur, vois-tu là-bas, là-bas, Vois-tu ce tourbillon s'élever sur la route ! Comme il grossit ! vers nous comme il vient à grands pas ! Que nous annonce-t-il ? un carrosse sans doute. » « — Oui, mon frère, et celui d'un prince assurément. » « —...
Fable II, Livre I. Aux lois de la nature, amis, soumettons-nous ; Toujours sa volonté l'emporta sur la nôtre. L'aimant disait au fer : Pourquoi me cherchez-vous ? Pourquoi m'attirez-vous ? soudain répondait l'autre. Notre faiblesse et ton pouvoir, Sexe enchanteur,...
De même espèce que la nôtre, Le sage est sujet à l'erreur. Notre Anglais, si j'en crois mon cœur, Se trompe ici tout comme un autre. De l'ami souvent, par détour, L'amant timide a pris le style ; Mais l'amitié sage et tranquille Prend-elle celui de l'amour ? Daphné,...
Fable VIII, Livre II. L'astre du jour rentrait dans sa carrière ;Les Guèbres l'adoraient. Quelle divinité,Disaient-ils à genoux, au sein de la poussière,Oserait avec toi disputer de beauté ?Ton domaine est l'immensité !Ta durée est l'éternité !Et ta présence la...
Fable X, Livre III. « Enfin j'ai trouvé le repos ! » Disait une huître de Marène. « Fidèle au nœud qui nous enchaîne, Ce roc me défendra des flots : Nous ne faisons qu'un ; je défie Au trident de nous séparer ; Je défie au temps d'altérer La tendre amitié qui nous...
Fable I, Livre III. Toi qui, peintre et rival de Flore, Comme elle à la nature empruntes les couleurs Dont se parent toutes les fleurs Que sous tes doigts on voit éclore, Que je porte envie à ton art ! Tout est rose pour toi. Plus tes tableaux fidèles Se rapprochent...
Fable XVII, Livre I. Un grand fleuve parcourt le monde : Tantôt lent, il serpente entre des prés fleuris, Les embellit et les féconde ; Tantôt rapide, il s'enfle, il se courrouce, il gronde, Roulant, précipitant au milieu des débris Son eau turbulente et profonde. À...
Fable XV, Livre V. « Je préfère un bon cœur à tout l'esprit du monde, Et d'amis à deux pieds je me passe fort bien, » Disait certain monsieur qui vit avec son chien Dans une retraite profonde. « Je n'ai pas d'autre ami que lui, Humains ; et s'il tient aujourd'hui La...
Fable XIII, Livre II. En Chine, un animal, singe de son métier, Crut, comme bien des gens, que, s'il changeait de cage, Il changerait de personnage. Profitant donc de l'heure où le saint du quartier, Chez le peintre où le charpentier, Se trouvait en raccommodage, Il...
Fable III, Livre III. Tu fais un fort mauvais métier, Quoiqu'il soit des plus à la mode, Disait à cet insecte inutile, incommode, Plat surtout, qui, parfois, nous oblige à veiller, Le ver industrieux que nourrit le mûrier. Pour toi, mordre est une habitude, Et...
De ce chaume heureux possesseur, De bon cœur, hélas ! que j'envie Tes travaux, ta philosophie, Ta solitude et ton bonheur ! Pour prix des soins que tu leur donnes, Tes arbustes reconnaissants Et des printemps et des automnes Te prodiguent les doux présents. Ô trop...
Fable V, Livre V. On ne supporte qu'à moitié Le poids des misères humaines, Quand le ciel accorde à nos peines Les tendres soins de l'amitié. Près de ce chien voyez son maître : Blessé par le poignard d'un traître, Dans sa douleur comme il sourit À l'infatigable...
Un jour entier peut-on bouder ! Cela passerait raillerie. Si j'ai cherché la brouillerie, C'était pour le plaisir de nous raccommoder. Pour notre utilité commune, Déride ce front soucieux : L'air fou du plaisir te sied mieux Que l'œil sournois de la rancune. Mon...
Fable I, Livre IV. Je n'aime pas ces paladins femelles Désavoués de Vénus et de Mars, Qui contre un heaume échangeaient leurs dentelles Portaient rondache, et brassards et cuissards ; Et, se jetant au milieu des hasards, L'épée au poing, contre de vieux soudars Ne...
(Qui faisait l'aumône en mon intention.) Faire l'aumône à son prochain C'est un précepte évangélique : Belle Églé, votre belle main Va, dit-on, le mettre en pratique. Excusez ma sincérité : Je vous crois peu compatissante, Et doute que la charité Soit votre vertu...
Fable XVIII, Livre II. Tandis que sa main droite achevait un tableau, Certain professeur en peinture Gourmandait sa main gauche, et disait : « La nature T'a fait là, pauvre peintre ! un assez sot cadeau. Jamais une esquisse, une ébauche, Un simple trait peut-il sortir...
(À Brunette, le chien de Sophie.) Objet si cher à ma Sophie, Toi que nourrit sa belle main, Toi qui passes toute ta vie Entre ses genoux et son sein ; Que ton sort, heureuse Brunette, Hélas ! est différent du mien ! En amant elle traite un chien, En chien, c'est...
(En lui envoyant les Amour de Psyché.) Lisez et relisez, ma sœur, De Psyché l'admirable histoire : Vous y verrez que le bonheur N'est pas toujours avec la gloire. Vous y verrez qu'assez souvent La plus belle est la plus à plaindre ; Et qu'un succès trop éclatant Est...
À Laure B. L'amour a transmis jusqu'à nous Les noms de Pétrarque et de Laure ; Ah ! d'eux si nous parlons encore, Combien l'on parlera de vous ! Laure est le miracle des belles, Pétrarque celui des amants : Prudes, poètes, cœurs constants, Voilà vos plus parfaits...
À M. P. D. S. R.Premier commis au département de l'intérieur, En lui envoyant un exemplaire de La Pucelle de Voltaire. Accueillez l'immortel enfant D'une muse un peu libertine ; Un philosophe qui badine Nous instruit en nous amusant. Par une hypocrite cabale L'honneur...
À M. Plasschaert. Qui, en m'expédiant un ouvrage de sa façon, indiquait : À l'auteur de La Feuille... en Europe. Auteur aimable autant qu'utile, Votre livre m'est parvenu ; À votre but, à votre style, Ma raison vous a reconnu. Vos vers pleins de délicatesse Pour mon...
Fable XIV, Livre I. Vive la liberté ! criait, dans la prairie ; L'unique fois, hélas ! qu'il se soit emporté, Martin, qui se croyait vraiment en liberté, Pour n'être pas à l'écurie. Un cerf lui dit : Pauvre imprudent ! Vivre libre et bâté n'est pas chose facile. Ne te...
Fable III, Livre I. D'Actéon, mes amis, vous savez l'aventure ; Vous savez qu'un peu cher il paya des transports Où la seule Diane a pu voir une injure. Aux mots qu'en son courroux cette prude murmure, Sans trop cacher pourtant ses pudiques trésors, Notre indiscret,...
Fable VII, Livre V. Hercule avait chassé sur le mont Pélion. Percés de traits inévitables, Frappés de coups épouvantables, Que de monstres défaits ! Un énorme lion À l'œil étincelant, à la voix menaçante, À la faim toujours renaissante, Depuis dix ans la crainte et...
Fable XVI, Livre III. Sans la pièce de bœuf il n'est point de dîné. Combien, en fait de bœuf, n'a-t-on pas raffiné ! En plus de cent façons je crois qu'il s'accommode : L'un veut qu'en miroton le bœuf soit mitonné, L'autre qu'en vinaigrette il pique assaisonné ; Moi,...
Supposant dans un seul objet Tout ce que j'exigeais pour plaire, J'adorais un être parfait, Et le croyais imaginaire. L'Amour, quand il m'offrit tes traits, Voulut me prouver ma folie : Mon fantôme et ses vains attraits Seraient tout au plus ta copie. Daphné, j'ai...
Tandis que sur l'herbe étendu, Au bord d'une onde enchanteresse, Fuyant et la molle paresse Et le travail trop assidu, Je ris de l'humaine faiblesse, Et j'use mes moments perdus À médire de notre espèce, Mais non pas des individus ; Qui peut troubler la paix du monde...
Fable XIV, Livre II. Dame Arachné dans un palais Se glissa sans être aperçue ; Sa toile n'était pas tissue Qu'en l'air étaient tous les balais. La pauvrette ! Comment fit-elle Pour échapper ? Je n'en sais rien ; Mais, l'instant d'après, je sais bien Qu'elle...
En leur envoyant la cantate intitulée La Tempête, qu'elles ont mise en musique. Souvent cette trame grossièreQu'ourdit la main du tisserandSe transforme en tapis brillantSous les jolis doigts de Glycère. Le chanvre obscur a disparu,Recouvert par l'or et la soie ;Ce...
Fable XVI, Livre IV. « Demande-t-on la bouche pleine ? » Disait ma femme à son marmot : « Fi ! qu'il est laid ! fi ! qu'il est sot ! Il n'aura plus rien pour sa peine. » Le marmot de pleurer, non qu'il eût appétit ; Mais il était à table, et c'était là son centre ;...
Verts bosquets, paisible asile, Où tout sourit à mon cœur ; D'innocence et de candeur Séjour aimable et tranquille ; En vain je veux retracer Le bonheur qui vous habite : Est-ce l'instant d'y penser Que l'instant où je vous quitte ? Hélas ! quand les plaintes vaines...