I La main s'enorgueillit de sa nudité calme Et d'être rose et lisse, et de jouer dans l'air Comme un oiseau narguant l'écume de la mer, Et de frémir avec des souplesses de palme. La main exulte ; elle est fière comme une rose – Sans songer que l'envers est un réseau... I La maladie est un clair-obscur solennel, L'instant mi-jour, mi-lune, angoissant crépuscule ! Dans l'ombre qui s'amasse, un reste de jour brûle ; Reverra-t-on la vie au delà du tunnel ? La maladie est une crise de lumière ; On sent planer l'ombre de l'aile de la mort... I Le soir descend dans les vitres et les submerge… Un rayon y vacille un moment comme un cierge, Dernier cierge frileux des vêpres terminées ! L'ombre déferle ; on ne sait quoi chavire en elles ; Les ultimes clartés sont vite éliminées, Et c'est comme un sommeil... I Tels yeux sont des pays de glace, un climat nu Où l'on chemine sans chemins dans l'inconnu ; D'autres, des soirs de province pleins de fumées Où passent des oiseaux aux ailes déplumées Qui leur font ces plaintifs regards intermittents ; D'autres vides, mais sous... À Théodore de Banville. L'enfant-poète, au seuil de ses jours, entendit Une voix frémissante et sombre qui lui dit : « Tu souffriras ! Ta mère en larmes va maudire La nuit où son amour a conçu son martyre, Quand elle te verra, déjà pâle et rêveur, Mordre en pleurant... À ma sœur Marie. I Le soir, quand je m'en vais tout seul le long des rues, Vers les faubourgs, pour voir le soleil se coucher. Je sens autour de moi mes deux sœurs disparues Comme des oiseaux blancs autour d'un noir clocher. Et j'en rêve avec plus de tendresse et de... Si vous rencontrez trop souvent — Parmi ces vers noirs et moroses Que j'écris le soir en rêvant — Le cortège des enfants roses ; Si vous trouvez trop de blondins, C'est ainsi que je les appelle, Trahissant par des cris badins Leur adorable ribambelle, C'est qu'au fond... À Madame William Pitt-Byrne. Sa mère l'aimait tant, ce petit rieur rose ! C'était son premier-né, première fleur éclose Sur l'arbuste pliant de leurs jeunes amours. Elle en rêvait les nuits et le soignait les jours, Joyeuse à contempler son adorable allure A peigner... À Jules Bailly. I C'étaient vraiment des gens heureux. Ils étaient trois : Le père, adroit maçon parmi les plus adroits ; La mère, brave femme à peu prés du même âge, Qui travaillait en ville et soignait son ménage ; Enfin, pour compléter ce doux intérieur, Un garçon,... I Qui de nous, jeune encore et naïf, n'a connu L'inexplicable émoi d'un amour ingénu Qui s'éveille au milieu d'un riant paysage ? Je le revois toujours le pâle et doux visage De celle qui m'aima d'un amour si profond. Nous n'avions que vingt ans tous les deux ;... I. L'eau sage s'est enclose en des cloisons de verre D'où le monde lui soit plus vague et plus lointain ; Elle est tiède, et nul vent glacial ne l'aère ; Rien d'autre ne se mire en ces miroirs sans tain Où, seule, elle se fait l'effet d'être plus vaste Et de se... I Donc on a l'air de vivre et de mirer la vie, Et d'être une eau docile où le couchant s'enflamme, Une eau candide où le matin se clarifie, Comme si l'Univers cessait au fil de l'âme. Oui ! c'est vrai que notre âme est pleine de reflets : Arbres, visages, ciels,... I En vain les vitres glauques des vieilles maisons Sont un rempart de verre humble qui s'interpose Entre la vie en fièvre et la calme âme enclose, Elles n'ont qu'embrumé l'appel des horizons. Le lointain ciel sans cesse y passe et les aère Du prestige de ses beaux... I Être le psychologue et l'ausculteur de l'eau, Étudier ce cœur de l'eau si transitoire, Ce cœur de l'eau souvent malade et sans mémoire. L'eau si pâle ! On dirait une sœur du bouleau Par le fard du couchant à peine un peu rosée ; Mais, dormante, elle rêve à... Par les après-midi d'hiver mélancoliques Je vais parfois dans les vieux temples catholiques, Quand c'est un jour de fête et qu'ils sont bien ornés, Quand les prêtres au fond des nefs sont prosternés Sous le jaunâtre éclat des lampes et des cierges, Et qu'on a mis... À François Coppée. I Marthe était née au fond d'un village des Flandres, Autour duquel un fleuve enroule ses méandres, De flots moirés coulant entre deux talus verts. Leur maison, nonobstant sa forme villageoise, Etait coquette avec son toit luisant d'ardoise Et ses... I Ils habitaient ensemble au quatrième étage, Ce qui, prétendaient-ils, leur donnait l'avantage De jouir les premiers des rayons du soleil. Le père était tailleur, et, sitôt son réveil, Il peinait vaillamment pour nourrir son ménage. Sa femme, jeune encore, à peu près... À Madame Louise Ackermann. L'implacable Infini dont tu souffres, poète, Nous en avons souffert comme toi, plus que toi ; Et nous avons aussi, pendant la nuit muette, Crispé nos poings d'ennui, de colère et d'effroi. Nous avons comme toi crié dans nos alarmes Vers ce... I Ne plus être qu'une âme au cristal aplani Où le ciel propagea ses calmes influences ; Et, transposant en soi des sons et des nuances, Mêler à leurs reflets une part d'infini. Douceur ! C'est tout à coup une plainte de flûte Qui dans cette eau de notre âme se... I Silence : c'est la voix qui se traîne, un peu lasse, De la dame de mon silence, à très doux pas Effeuillant les lis blancs de son teint dans la glace ; Convalescente à peine, et qui voit tout là-bas Les arbres, les passants, des ponts, une rivière Où cheminent de...