16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Les Toscans batailloyent donnant droit dedans Rome Les armes à la main, la fureur sur le front, Quand on veit un Horace avancé sur le pont, Et d'un coup arrester tant d'hommes par un homme. Apres un long combat et brave qu'on renomme Vaincu non de valeur, mais d'un...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Ne vous estonnez point si mon esprit qui passe De travail en travail par tant de mouvemens, Depuis qu'il est banni dans ces esloignemens, Tout agile qu'il est ne change point de place. Ce que vous en voyez, quelque chose qu'il face, Il s'est planté si bien sur si bons...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Quand je voy les efforts de ce Grand Alexandre, D'un Cesar dont le sein comblé de passions Embraze tout de feu de ces ambitions, Et n'en laisse apres soy memoire qu'en la cendre. Quand je voy que leur gloire est seulement de rendre, Apres l'orage enflé de tant...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Qui seroit dans les Cieux, et baisseroit veuë Sur le large pourpris de ce sec element, Il ne croiroit de tout, rien qu'un poinct seulement Un poinct encor caché du voile d'une nue : Mais s'il contemple apres ceste courtine blue, Ce cercle de cristal, ce doré...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Si j'avois comme vous mignardes colombelles Des plumages si beaux sur mon corps attacgez, On auroit beau tenir mes esprits empeschez De l'indomptable fer de cent chaines nouvelles : Sur les aisles du vent je guiderois mes aisles J'irois jusqu'au sejour où mes biens...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Ce tresor que j'ay pris avecques tant de peine Je le veux avec peine encore conserver, Tardif a reposer, prompt a me relever, Et tant veiller qu'en fin on ne me le suprenne. Encor que des mes yeux la garde plus certaine Aupres de son sejour ne te puisse trouver, Et...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
En vain mille beautez à mes yeux se presentent, Mes yeux leur sont ouvers et mon courage clos, Une seule beauté s'enflamme dans mes os Et mes os de ce feu seulement se contentent : Les vigueurs de ma vie et du temps qui m'absentent Du bien-heureux sejour où loge mon...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Je contemplois un jour le dormant de ce fleuve Qui traine lentement les ondes dans la mer, Sans que les Aquilons le façent escumer Ni bondir, ravageur, sur les bords qu'il abreuve. Et contemplant le cours de ces maux que j'espreuve Ce fleuve dis-je alors ne sçait que...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Vous languissez, mes vers ; les glaçons de l'absence Éteignant vos fureurs au point de leur naissance, Vous n'entrebattez plus de soupirs votre flanc, Vos artères d'esprits, ni vos veines de sang. En quoi ! la mort vous tient ? et ce front teint en cendre Vous marque...
Jean de Sponde, Meilleur par Auteur
Voici le meilleur de la poésie de Jean de Sponde. Qui sont, qui sont ceux-là, dont le cœur idolâtre - Jean de Sponde Qui sont, qui sont ceux-là, dont le cœur idolâtreSe jette aux pieds du Monde, et flatte ses honneurs,Et qui sont ces valets, et qui sont ces...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Mais si mon foible corps (qui comme l'eau s'escoule) Et s'affermit encor plus longtemps qu'un plus fort) S'avance à tous moments vers le sueil de la mort, Et que mal dessus mal dans le tombeau me roule, Pourquoy tiendray-je roide à ce vent qui saboule Le Sablon de mes...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Tout le monde se plaint de la cruelle envie Que la nature porte aux longueurs de nos jours : Hommes, vous vous trompez, ils ne sont pas trop cours, Si vous vous mesurez au pied de vostre vie. Mais quoy ? je n'entens point quelqu'un de vous qui die : Je me veux...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Mon cœur ne te rends point à ces ennuis d'absence, Et quelque forts qu'ils soient sois encore plus fort, Quand même tu serais sur le point de la mort Mon cœur, ne te rends point, et reprends ta puissance. Que si tant de combats te donnent connaissance Que tu n'es pas...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Tout s'enfle contre moy, tout m'assaut, tout me tente, Et le Monde et la Chair, et l'Ange revolté, Dont l'onde, dont l'effort, dont le charme inventé Et m'abisme, Seigneur, et m'esbranle, et m'enchante. Quelle nef, quel appuy, quelle oreille dormante, Sans peril, sans...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Mon Dieu, que je voudrais que ma main fût oisive, Que ma bouche et mes yeux reprissent leur devoir ! Écrire est peu : c'est plus de parler et de voir, De ces deux œuvres l'une est morte et l'autre vive. Quelque beau trait d'amour que notre main écrive, Ce sont témoins...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Voulez-vous voir ce traict qui si roide s'eslance Dedans l'air qu'il poursuit au partir de la main ? Il monte, il monte, il perd : mais helas ! tout soudain Il retombe, il retombe, et perd sa violence. C'est le train de noz jours, c'est ceste outrecuidance Que ces...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Mon Soleil qui brillez de vos yeux dans mes yeux, Et pour trop de clarté leur ôtez la lumière, Je ne vois rien que vous, et mon âme est si fière Qu'elle ne daigne plus aimer que dans les cieux. Tout autre amour me semble un enfer furieux Plein d'horreur et de mort...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Mortels, qui des mortels avez pris vostre vie, Vie qui meurt encor dans le tombeau du Corps, Vous qui r'amoncelez vos tresors, des tresors De ceux dont par la mort la vie fust ravie : Vous qui voyant de morts leur mort entresuivie, N'avez point de maisons que les...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Ne vous étonnez point si mon esprit qui passe De travail en travail par tant de mouvements, Depuis qu'il est banni dans ces éloignements, Tout agile qu'il est ne change point de place. Ce que vous en voyez, quelque chose qu'il fasse, Il s'est planté si bien sur si...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Et quel bien de la Mort ? où la vermine ronge Tous ces nerfs, tous ces os ; où l'Ame se depart De ceste orde charongne, et se tient à l'escart, Et laisse un souvenir de nous comme d'un songe ? Ce corps, qui dans la vie en ses grandeurs se plonge, Si soudain dans la...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Pour qui tant de travaux ? pour vous ? de qui l'aleine Pantelle en la poictrine et traine sa langueur ? Vos desseins sont bien loin du bout de leur vigueur Et vous estes bien pres du bout de vostre peine. Je vous accorde encore une emprise certaine, Qui de soy court...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Ha ! que j'en voy bien peu songer à ceste mort Et si chacun la cerche aux dangers de la guerre ! Tantost dessus la Mer, tantost dessus la Terre, Mais las ! dans son oubli tout le monde s'endort. De la Mer, on s'attend à ressurgir au Port, Sur la Terre, aux effrois...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Quand le vaillant Hector, le grand rempart de Troie, Sortit tout enflammé, sur les nefs des Grégeois, Et qu'Achille charmait d'une plaintive voix Son oisive douleur, sa vengeance de joie. Comme quand le Soleil dedans l'onde flamboie L'onde des rais tremblants repousse...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Helas ! contez vos jours : les jours qui sont passez Sont desja morts pour vous, ceux qui viennent encore Mourront tous sur le point de leur naissante Aurore, Et moitié de la vie est moitié du decez. Ces desirs orgueilleux pesle mesle entassez, Ce cœur outrecuidé que...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Qui serait dans les Cieux, et baisserait sa vue Sur le large pourpris de ce sec élément, Il ne croirait de tout rien qu'un point seulement, Un point encore caché du voile d'une nue. Mais s'il contemple après cette courtine bleue, Ce cercle de cristal, ce doré...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Il est vrai, mon amour était sujet au change, Avant que j'eusse appris d'aimer solidement, Mais si je n'eusse vu cet astre consumant, Je n'aurais point encor acquis cette louange. Ore je vois combien c'est une humeur étrange De vivre, mais mourir, parmi le changement,...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Qui sont, qui sont ceux-là, dont le cœur idolâtre Se jette aux pieds du Monde, et flatte ses honneurs, Et qui sont ces valets, et qui sont ces Seigneurs, Et ces âmes d'Ebène, et ces faces d'Albâtre ? Ces masques déguisés, dont la troupe folâtre S'amuse à caresser je...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Je contemplais un jour le dormant de ce fleuve Qui traîne lentement les ondes dans la mer, Sans que les Aquilons le fassent écumer Ni bondir, ravageur, sur les bords qu'il abreuve. Et contemplant le cours de ces maux que j'épreuve, Ce fleuve, dis-je alors, ne sait que...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Si c'est dessus les eaux que la terre est pressée, Comment se soutient-elle encor si fermement, Et si c'est sur les vents qu'elle a son fondement, Qui la peut conserver sans être renversée ? Ces justes contrepoids qui nous l'ont balancée Ne penchent-ils jamais d'un...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Je meurs, et les soucis qui sortent du martyre Que me donne l'absence, et les jours, et les nuits Font tant qu'à tous moments je ne sais que je suis, Si j'empire du tout ou bien si je respire ; Un chagrin survenant mille chagrins m'attire Et me croyant aider moi-même...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Si j'avais comme vous, mignardes colombelles, Des plumages si beaux sur mon corps attachés, On aurait beau tenir mes esprits empêchés De l'indomptable fer de cent chaînes nouvelles, Sur les ailes du vent je guiderais mes ailes, J'irais jusqu'au séjour où mes biens...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Je sens dedans mon âme une guerre civile, D'un parti ma raison, mes sens d'autre parti, Dont le brûlant discord ne peut être amorti Tant chacun son tranchant l'un contre l'autre affile. Mais mes sens sont armés d'un verre si fragile Que si le cœur bientôt ne s'en est...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Si tant de maux passez ne m'ont acquis ce bien, Que vous croyez au moins que je vous suis fidelle, Ou si vous le croyez, qu'à la moindre querelle Vous me faciez semblant de n'en plus croire rien ; Belle, pour qui je meurs, belle, pensez vous bien Que je ne sente point...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Les vents grondaient en l'air, les plus sombres nuages Nous dérobaient le jour pêle-mêle entassés, Les abîmes d'enfer étaient au ciel poussés, La mer s'enflait des monts, et le monde d'orages ; Quand je vis qu'un oiseau délaissant nos rivages S'envole au beau milieu...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Mes yeux, ne lancez plus votre pointe éblouie Sur les brillants rayons de la flammeuse vie, Cillez-vous, couvrez-vous de ténèbres, mes yeux : Non pas pour étouffer vos vigueurs coutumières, Car je vous ferai voir de plus vives lumières, Mais sortant de la nuit vous...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Ma belle languissait dans sa funeste couche Où la mort ces beaux yeux de leurs traits désarmait, Et le feu dans sa moëlle allumé consumait Les lys dessus son front, les roses sur sa bouche. L'air paraissait autour tout noir des nuits funèbres Qui des jours de la vie...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Que faites-vous dedans mes os, Petites vapeurs enflammées, Dont les pétillantes fumées M'étouffent sans fin le repos ? Vous me portez de veine en veine Les cuisants tisons de vos feux, Et parmi vos détours confus Je perds le cours de mon haleine. Mes yeux, crevés de...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Mais si faut-il mourir ! et la vie orgueilleuse, Qui brave de la mort, sentira ses fureurs ; Les Soleils haleront ces journalieres fleurs, Et le temps crevera ceste ampoule venteuse. Ce beau flambeau qui lance une flamme fumeuse, Sur le verd de la cire esteindra ses...
16ème siècle, Jean de Sponde, Poèmes
Tandis que dedans l'air un autre air je respire, Et qu'à l'envy du feu j'allume mon desir, Que j'enfle contre l'eau les eaux de mon plaisir, Et que me colle à Terre un importun martyre, Cest air tousjours m'anime, et le desir m'attire, Je recerche à monceaux les...