19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Comme un collier sans fin s'enchaînant goutte à goutte Les étincelles d'eau qui perlent à la voûte, S'y sculptent d'elles-mêmes en nuage argenté, Et donnent pour coupole, à ce temple enchanté, Un ciel de marbre blanc semé d'astres de neige. Les songes ciselés des...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Je déteste aujourd'hui le retour du soleil, Et des champs repeuplés le verdoyant réveil. La terre caressante étincelle de charmes, L'univers se ranime… Et je meurs dans les larmes ! Que me font aujourd'hui ces feuilles, ces ruisseaux, Et ces mouches d'azur sur les...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Quand les vents froids du nord, sifflant dans la vallée, Courbaient des saules noirs la tête échevelée ; Quand la neige, en nos champs dépeuplés de gazon, Laissait tomber des airs sa frileuse toison, J'accusais tristement l'hiver de ma paresse, Mais que l'herbe,...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Gondolier ! à Venise. — O ville enchanteresse ! Enfin je t'aperçois : Venise, une déesse A d'un coup de baguette élevé sur les mers Tes châteaux élégants, ton magique univers ! Au détroit de Sicile, on prétend que Morgane, Déroulant tout à coup sa cité diaphane, Y...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Oui, lorsque de son âme entr'ouvrant les abîmes, On en tâte des yeux les profondeurs sublimes, Et qu'on en suit en soi les flux et les reflux, Nous y voyons souvent, entiers ou vermoulus, Se dresser devant nous des quartiers de pensée D'une date inconnue, ou du moins...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Nous étions à moitié de tout. MONTAIGNE. Liv. I, chap. 27. Au milieu de ces monts qui dominent l'Alsace, Où de muets torrens, des abîmes de glace Assiègent de dangers les pas du voyageur, Où d'antiques ravins la profonde largeur Semble, en se dérobant sous l'épaisseur...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Victa morte finit sœpe vitam, spiritu prius Deficiente, quam cantu. PLINE, X. 29. Le soleil par le soir était déjà voilé, Le platane déjà, le saule échevelé, Allongeait sur les eaux une ombre plus obscure ; Sous les lois du sommeil ramenant la nature, Le silence...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Parabole Nulla autem effigies…. . …. . Mentes habitare et pectora gaudet. STAT. THEB. , L. XII. Ébloui de l'éclat de sa propre couronne, Quand le fils de Philippe était à Babylone, Il voulut, non content de vaincre les mortels, A son pouvoir terrestre asservir les...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Hibernas juvat exercere palestras. C. CALCAGNINUS. Déjà depuis deux jours la piquante froidure Enchaînait des ruisseaux la course et le murmure ; Et les troupeaux frileux, chassés par la saison, Semblaient avoir aux champs oublié leur toison : Il neigeait. Mélœnis,...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
…. Quos hora novissima junxit, Componi tumulo non invideatis eodem. OVID. , liv. IV. Elle était blanche et pure, et jamais dans Leinster Les eaux n'ont répété de traits plus adorables Que les traits de Lucie, amante de Walter. Croyant, d'après le sien, tous les amours...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Élégie d'une jeune fille Velut prati Ultimi flos prœtereunte postquam Tactus aratro est. CATULLE. Nous sommes au printemps, et nos bois sont déserts, Et le printemps n'a pas, ramenant ses concerts, Réveillé les oiseaux endormis sous les branches ; L'aubépine est en...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Vous l'avez arrachée de mon sein, et je n'ai pu cacher le sang de ma blessure. OTWAY, Don Carlos. I C'est l'heure où sur la branche on entend Philomèle Ravir l'air de ses chants que la plainte entremêle ; Où l'amant, introduit dans un furtif séjour, Fait d'éternels...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Mes chers petits enfants, pendant que vous dormez, Je vous offre à tous deux ces feuillets imprimés, Où mon âme se cache à l'ombre de la rime : A toi, mon premier-né, grave et gentil Maxime, Déjà vieux de six ans, et savant comme à sept, Qui lis la Barbe-Bleue et le...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Je suis au but ! mes pas ont touché l'Italie. Par le feu d'un beau ciel la nature embellie Des langueurs du sommeil va tirer mes pinceaux ; Mon luth s'élancera vers des accents nouveaux ; Oui, je veux, à l'oubli condamnant ma tristesse, Retrouver les transports de ma...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Celui qui survit à l'objet qu'il aime, se trouve comme an milieu d'un peuple sauvage, il parle et n'est point entendu ; on lui parle, il ne peut répondre…. . Inaccessible aux émotions douces, même à celles de la vertu, il ne la regarde que comme un devoir ; il ne se...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Toi, Vertu, pleure si je meurs. A. Chénier. Famae curribus arduis levatus Quà surgunt animae potentiores, Terras despicis, et sepulcra rides. STAT. , liv. II, Elég. VII. Il existe des fleurs qui, sur des bords déserts, De parfums enchantés n'embaument que les airs ;...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
I suoi pensieri in lui dormir non ponno. TASSO. Ger. Lib. , c. 10. Le Drame d'où j'ai tiré cette Scène est une dès compositions les plus bizarres de lord Byron, peut- être la plus belle. Manfred est un homme ravagé par le souvenir d'une sœur incestueuse, morte depuis...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Flet noctem, ramoque sedens miserabile carmen Integrat. VIRG. Si quand l'aube amène le jour, Ou que le soir est de retour, Je m'égare dans la vallée ; Je cherche, hélas ! mais sans la voir La bergère belle et voilée Qui jadis sous l'ombre isolée, En m'appelant venait...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Ils ne sont plus les jours, où l'homme était crédule, Où lorsque, vers minuit, la gothique pendule Voyait se réunir ses aiguilles d'acier, On disait que la mort, sur son pâle coursier, En attendant du jour les clartés renaissantes, Visitait son domaine et ses tombes...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Cùm scelus admittunt, superest constantia… Juv. , sat. XIII. Il y a des caractères élevés qui portent jusque dans le crime je ne sais quoi de fier et de généreux, qui laisse voir au dedans encore quelque étincelle de ce feu céleste fait pour animer les belles âmes. J....
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Imitation de Walter Scott Hic nostri reditus… ! VIRG. liv. XI. J'entends donc de nouveau résonner sur ma tête Le pin du Clanbrassil que presse la tempête ; Des échos du rocher je reconnais la voix ; Je reconnais aussi l'obscurité des bois, Et les ondes du fleuve, et...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Les sabliers nous avertissent que nous devenons tous ce qui compte nos instants. Les clepsydres nous disent qu'il n'y a pas dans ce monde une minute qui ne puisse être marquée par une larme, et que les générations qui se succèdent ne sont rien de plus que des gouttes...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Remember me. — Oh ! pass not thou my grave Without one thought whose relicts there recline. L. BYRON. The Corsaire. Oui, je sens que de moi tout amour se retire, Et que les sons d'amour ont épuise ma lyre ; Adieu de mes ennuis le séduisant poison. Si jamais cependant,...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Élégie dans le goût antique Virginitas, Virginitas, quo abis, me relicta. SAPHO « Pourquoi ne pas m'entendre, ô ma blanche maîtresse ? « Mes mains, si vous venez, mes mains vous offriront « Les plus belles des fleurs, dont s'émaille la Grèce : « La Grèce les destine à...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Lavoisier ne veut plus que l'eau soit un élément ; son art la décompose. L'eau visible renferme deux principes invisibles : deux gaz, dont l'un s'enflamme, dont l'autre accélère la combustion. Ainsi l'eau, qui rafraîchit et féconde, a pour principe ce qui brûle et ce...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
L'approche de la mort nous fait prendre en pitié les grandeurs de la terre ; elle désabuse jusqu'à l'ambitieux. On dit que, se sentant mourir, Alexandre, qui se décernait tout vivant des hécatombes de peuples, qui s'en allait par l'univers avec sa meute de soldats à...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Des voyageurs racontent qu'au milieu des glaces arctiques, ils rencontrèrent un vieux navire gelé par les hivers. Ils pénétrèrent, avec une terreur mêlée de respect, dans cette nef vide et froide, où tout semblait métamorphosé par le temps : les voiles, les agrès,...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
On demande ce que deviennent les jours qui ne sont plus, et si c'est le cœur de l'homme qui leur sert de tombeau. Non, croyez-moi ; tout paraît mourir, mais rien ne meurt en effet ; hier existe encore, quoique vous ne le voyiez plus. Vos jours évanouis sont des...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Ne maudissez pas la vie parce qu'elle a des jours nébuleux et sombres : l'homme passe plus vite encore que les nuages qui l'attristent. Traversez par la pensée le voile qui vous cache les cieux, et le soleil ne vous manquera pas. Ne laissez pas de pâles brouillards...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Tous les marins vous raconteront la légende du vaisseau-spectre, de ce vaisseau de brouillard, monté par des fantômes, qui apparaît à l'improviste sur les flots, comme aux limites de l'horizon le nuage cuivré où couve la tempête. La tempête éclate ! toutes vos voiles...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
C'était l'automne, la nuit. Le vent sifflait dans les arbres dépouillés du bois, et miaulait le long des bergeries, comme s'il eût voulu, pour se réchauffer, partager la litière des moutons. La pluie fouettait avec rage les vitraux de ma chaumière, et comme irritée de...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
L'homme a beau s'insurger contre ses rêves, ses rêves sont plus forts que lui. Une impression qu'il ne peut ni maîtriser, ni comprendre, vient souvent contredire à l'improviste les plus hautes spéculations de son esprit, donner un démenti à ses plus intrépides...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Il m'est impossible de regarder sans une sorte de tristesse ces chemins merveilleux auxquels notre industrie semble donner des ailes. Je ne sais si c'est un progrès que de pouvoir fendre ainsi l'espace comme une flèche ; mais ce qu'il y a de sûr, c'est que cela me...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Jamais coupe d'opale, où boivent les abeilles, Jamais perle d'azur, étoilant nos corbeilles, Ou vivant de notre air dans l'air vivant des blés, N'ont agi plus longtemps sur mes songes troublés, Que ce fantôme noir d'une plante momie, Dans son champ souterrain six...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
C'était l'heure agréable où le jour qui décline Ramène la fraîcheur de la brise marine, Où l'on respire en paix : c'était un soir d'été. Le soleil semblait fuir avec rapidité, Et, prêt à se cacher, le soleil, qui peut-être Dans ce funeste jour n'aurait pas dû...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Il existe un oiseau, dont le pâle plumage, Des forêts du tropique étonne la gaieté ; Seul sur son arbre en deuil, les pleurs de son ramage Font gémir de la nuit le silence attristé. Le chœur ailé des airs, loin de lui rendre hommage, Insulte, en le fuyant, à sa...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
Regardez ce vaisseau, dont une mer fatale Semait d’écueils tranchants la route boréale ; Qui, captif de l’hiver, dont l’acerbe rigueur De ses muscles de cuivre oxydait la vigueur, Voyait le pôle, armé d’immobiles naufrages, Autour de sa voilure engourdir ses cordages...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
En ma jeune saison j’aimai d’amour extrême ; J’ai reposé ma bouche aux lèvres de Lénor. Hélas ! j’aurai sans doute offensé ce que j’aime ; Lénor de ses baisers m’a repris le trésor. Oui Lénor, j’ai failli, car je fus trop fidèle. Un nom cher et sacré m’animait aux...
19ème siècle, Jules Lefèvre-Deumier, Poèmes
L’aquilon frémissait ; une horrible tempête Des vagues dans le Ciel semblait cacher le faîte. Au milieu des débris des vaisseaux fracassés, La mer portait alors sur ses flancs courroucée, Une barque, ou plutôt une prison flottante, Car partout une main cruellement...