XCI. A la beauté les yeux comme à leur centre tirent, Le cœur et les désirs suivent des vœux les lois : On ne sauroit garder ce que plusieurs désirent, Et les désirs ne sont sous l'Empire des Rois. XCII. Tout l'heur et le malheur qui se rencontre aux hommes, Vient de...
XCI. Il tarde au Pèlerin d'achever son voyage, Le Marinier voudroit n'être plus sur les eaux : Tout ouvrier s'éjouit au bout de son ouvrage, L'Homme pleure approchant de la fin de ses maux. XCII. Pour un temps la clarté du Soleil est ravie, Mais tu la recevras bien...
I. Cette grandeur des Rois, qui nous semble un Colosse, N'est qu'ombre, poudre et vent. L'unique honneur des Rois, D'une exécrable main meurt dedans son carrosse, Au temps que l'Univers trembloit dessous ses lois. II. Hier tout étoit triomphe, aujourd'hui chacun...
XI. Tu dois ton âme au Ciel, ne fais pas qu'il te l'ôte, Par force, le Chrétien la rend de son bon gré : Il faut traiter l'esprit comme on traite son hôte, Que l'on ne contraint pas de fauter le degré. XII. Mieux vaut choir, que toujours de la chute être en crainte,...
XXI. Tu dis qu'il n'est pas temps, mondain, que tu t'amendes, Mais Dieu hait le pécheur qui au péché croupit : Sa clémence paroît aux offenses plus grandes, En vain l'attend celui qui pèche par dépit. XXII. Qui de ce qu'il a dit, fait, ou pense, demande A soi-même le...
XXXI. Pour avoir un bon Roi, un Conseil juste et sage, Un peuple obéissant, et une ferme paix, L'état n'est sûr pourtant : le calme suit l'orage, Aux plus beaux jours on voit les brouillards plus épais. XXXII. Homme, bien que tu sois du Ciel originaire, N'entreprends...
XLI. Le méchant toujours tremble, il est tout en alarme L'œil d'un homme de bien le tient comme abattu ; De Rome tout le monde a redouté les armes Rome d'un seul Caton redoute la vertu. XLII. Le vice aveugle l'âme et son jugement brouille, Confond le bien au mal,...
LI. Partout la vanité du monde se découvre : Je plains ces beaux esprits charmés de son amour ; Elle se cache au Temple, elle se montre au Louvre, Et pour la bien connoître il faut suivre la Cour. LII. Par les mauvaises mœurs la nature s'altère, On n'a pas tout à coup...
LXI. Il est dur de mourir éloigné de sa ville, Mais la mort n'est plus douce à la ville qu'aux champs : Elle n'épargne pas hors de Rome Rutille, Ni tel qui sans sortir y fût quatre vingts ans. LXII. Bien que l'homme se trouve au dernier point de l'âge, Qu'en vain son...
LXXI. Pour qui réserves-tu le fruit de tes fatigues ? Que servent les trésors l'un sur l'autre entassés ? En un jour on verra les héritiers prodigues, Dissiper tant de biens en cent ans amassés. LXXII. La libéralité veut être toute entière, Sans toutes fois donner en...
LXXXI. Ce bigot qui ses vœux sur son mérite fonde, Dont le cœur va partout, et n'a l'œil qu'en un lieu, Honteux n'oseroit dire au moindre homme du monde, Les choses que profane il n'ose dire à Dieu. LXXXII. L'or dans le feu s'affine, et l'esprit dans la peine ; Le ver...
LXI. La vie par l'effet s'estime, et non par l'âge, L'œuvre et non la durée en fait le jugement : Prou vit qui a vécu jusqu'à ce qu'il soit sage, Le bien vivre s'altère en vivant longuement. LXII. Les Actes longs ne font bonne le Comédie, Il la faut estimer selon...
LXXI. L'esprit dedans ce corps est retenu par force, Il y vit en danger, en frayeur il y dort : Il faut pour faire fruit qu'il rompe son écorce Et pense que jamais assez tôt il n'en sort. LXXII. L'âme se plaint du corps, le corps se plaint de l'âme, Mais la Mort les...
LXXXI. Le Marinier qui va de naufrage en naufrage, Qui comme le plongeon vit en l'eau nuit et jour, L'objet de tous les vents, le jouet de l'orage, Ne changeroit sa vie à celle de la Cour. LXXXII. La Cour te trompe ainsi que l'ange des ténèbres, Quand il donne aux...
I. Estime qui voudra la Mort épouvantable, Et la fasse l'horreur de tous les animaux, Quant à moi je la tiens pour le point désirable, Où commencent nos biens, et finissent nos maux. II. L'homme abhorre la mort, et contr'elle murmure, Ignorant de la loi, qui pour son...
XI. Le fruit sur l'arbre prend sa fleur, et puis se nouë, Se nourrit, se meurit, et se pourrit enfin : L'homme naît, vit et meurt, voila sur quelle rouë Le temps conduit son corps au pouvoir du destin. XII. Cette vie est un arbre, et les fruits sont les hommes, L'un...
XXI. Ce cœur ambitieux qui te donne des ailes, Pour trouver d'autres mers au delà de nos mers, Où tu vois des monts d'or, et des ruisseaux de perles, Ne sauvera ton corps du pillage des vers. XXII. Ce plaisir qui l'oreille à la raison étoupe, Empoisonne le cœur,...
XXXI. L'Empire d'Assyrie est tout réduit en cendre, Par les Grecs sont vaincus le Perse et le Médois : Quatre Rois sont sortis du Sceptre d'Alexandre, Et leur couronne enfin fuit de Rome les Lois XXXII. Où sont ces Empereurs, ces foudres de la guerre, Qui des lauriers...
XLI. Cette Reine qui n'eût qu'un château pour retraite, Prisonnière çà bas, et Princesse là haut, Sentit un vent d'acier qui lui trancha la tête, Changeant son Royal Trône au sanglant échafaud. XLII. Ce Roi qui pouvoit voir en ses États reluire L'Astre du jour après...
LI. Il n'y a point de mort soudaine à l'homme sage, De tous les accidents son cœur va au devant : Quand il s'embarque il pense au péril du naufrage, Et cesse de voguer quand il n'a plus de vent. LII. Puisque tu ne sais pas où la mort te doit prendre, Si de nuit ou de...