19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
En casques de cristal azur, les baladines, Dont les pas mesurés aux cordes des kinnors Tintent sous les tissus de tulle roidis d’ors, Exultent de leurs yeux pâles de paladines. Toisons fauves sur leurs lèvres incarnadines, Bras lourds de bracelets barbares, en essors...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
Mon front pâle est sur tes genoux Que jonchent des débris de roses ; O femme d'automne, aimons-nous Avant le glas des temps moroses ! Oh ! des gestes doux de tes doigts Pour calmer l'ennui qui me hante ! Je rêve à mes aïeux les rois, Mais toi, lève les yeux, et...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
Ce fut en un soir où les chansons Des amants liés par leurs mains lasses Mouraient, ô Dame pâle qui passes, Au clair de la lune des moissons. Long penchée au bord des lourds calices Des lys, fleurs des reines et des rois, Tu faisais le signe de la croix Comme une qui...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
La blême lune allume en la mare qui luit Miroir des gloires d'or, un émoi d'incendie. Tout dort. Seul, à mi-mort, un rossignol de nuit Module en mal d'amour sa molle mélodie. Plus ne vibrent les vents en le mystère vert Des ramures. La lune a tû leurs voix nocturnes :...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
A l'heure du réveil des sèves L'Amour, d'un geste las, Sème les rimes et les rêves Parmi les lis et les lilas. La brise, sœur des hirondelles, Déferle son essor, Et frôle de mille coups d'ailes Les corolles d'azur et d'or. Amour, pour fêter ta victoire Les cieux se...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
Ô narcisses et chrysanthèmes De ce crépuscule d'automne Où nos voix reprenaient les thèmes Tant tristes du vent monotone ! Des enfants dansaient sur la route Qui mène vers la lande noire Où hurla jadis la déroute, Sous la lune, des rois sans gloire. Nous chantions des...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
Sous le souffle étouffé des vents ensorceleurs J'entends sourdre sous-bois les sanglots et les rêves : Car voici venir l'heure où dans des lueurs brèves Les feuilles des forêts entonnent, chœur en pleurs, L'automnal requiem des soleils et des sèves. Comme au fond...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
Ô paix de ce pays d'ici Où jadis nous nous aimâmes Par nos corps et par nos âmes, Ô paix de ce pays d'ici ! Le crépuscule dans les arbres Dont tous les oiseaux sont fous De s'être aimés comme nous, Le crépuscule dans les arbres ! Et ce fleuve sous la forêt Où, sœur...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
Des rossignols chantant à des lys Sous la lune d'or de l'été, telle, O toi, fut mon âme de jadis. Tu vins cueillir mes lys d'espoir, Belle, Mes lys qui saignèrent dans ta main Quand se leva la lune nouvelle. Amour, sera-ce bientôt demain, Demain matin et ses chants de...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
I Mon cœur, ô ma Chimère, est une cathédrale Où mes chastes pensers, idolâtres du Beau, S'en viennent à minuit sous la flamme lustrale Râler leur requiem au pied de ton tombeau. J'ai dressé sous le ciel du dôme un sarcophage Dont la grave épitaphe en strophes de...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
Le clair soleil d'avril ruisselle au long des bois. Sous les blancs cerisiers et sous les lilas roses C'est l'heure de courir au rire des hautbois. Vos lèvres et vos seins, ô les vierges moroses, Vont éclore aux baisers zézayants du zéphyr Comme aux rosiers en fleur...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
I O l'ineffable horreur des étés somnolents Où les lilas au long des jardins s'alanguissent Et les zéphyrs, soupirs de sistres indolents, Sur les fleurs de rubis et d'émeraude glissent ! Car les vieilles amours s'éveillent sous les fleurs, Et les vieux souvenirs, sous...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
Voici s’endormir les heures brèves Qui frissonnent de froid et de peur. La meute invisible de nos rêves Poursuit la lune dont la lueur Emeut l’âme de l’eau sur les grèves Et fait crier l’amour dans mon cœur. Je me trouve au tournant de la route, Les yeux cherchant ce...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
Tu vins vers moi par les vallées Où s'effeuillaient les azalées, O sœur des heures en allées ! Ta toison était de couleur Rousse, et ta bouche de douleur Pareille à la mort d'une fleur. Tes yeux semblaient des cieux d'automne Où le dernier orage tonne, Mélancolique et...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
Par les vastes forêts, à l'heure vespérale, Les ruisseaux endormeurs modulent leurs sanglots : Mon âme s'alanguit d'une horreur sépulcrale A l'heure vespérale où murmurent les flots. Les ruisseaux endormeurs modulent leurs sanglots Sous les feuilles que frôle un vent...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
Une nuit, sous la terrible lune Qui saignait parmi les brumes roses, Tu parlais, ô sœur, de tristes choses Comme une enfant prise de rancune. Au loin les appels des mauvais hommes Nous montaient des vergers de la plaine Où les arbres tordus par la haine Tendaient,...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
Je suis ce roi des anciens temps Dont la cité dort sous la mer Aux chocs sourds des cloches de fer Qui sonnèrent trop de printemps. Je crois savoir des noms de reines Défuntes depuis tant d'années, Ô mon âme ! et des fleurs fanées Semblent tomber des nuits sereines....
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
Le fébrile frisson des murmures d'amour M'émeut ce soir les nerfs et vieillit ma mémoire. La voix d'un violon sous la soie et la moire Me miaule des mots d'inéluctable amour. La verveine se pâme en les vases de jade : Un fantôme de femme en l'alcôve circule. Mais ma...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
C’est la pluie, comme un frais pardon, Sur la route qui poudroie au soleil, Et parmi les jardins de ce printemps vermeil, C’est le tintement clair des gouttes qui font Des ronds dans l’eau glauque des citernes. Sur les collines les nuages roses cernent Amoureusement...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
Au temps du gazouillis des feuilles, en avril, La voix du divin Pan s'avive de folie, Et son souffle qui siffle en la flûte polie Eveille les désirs du renouveau viril. Comme un appel strident de naïade en péril L'hymne vibre en le vert de la forêt pâlie D'où répond,...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
C’est la Ville malade et lasse comme une mère, Qui dort d’un lourd sommeil au bord d’un fleuve de mort. Tant de ses fils, jadis, casqués d’ailes de chimère, Sont partis, poings crispés à leur bannière éphémère, Qu’elle a peur, ce soir-ci, des souvenirs du sort. Aussi...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
Je veux que l’Amour entre comme un ami dans notre maison, Disais-tu, bien-aimée, ce soir rouge d’automne Où dans leur cage d’osier les tourterelles monotones Râlaient, palpitant en soudaine pâmoison. L’Amour entrera toujours comme un ami dans notre maison, T’ai-je...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
Le lierre noir et la rose églantine Défendent les portes du jardin Où le soir d'un printemps qui s'obstine Est tout d'azur et d'incarnadin. Dehors s'éplorent les folles fontaines Qui virent mi-mort d'amour l'Enfant Venu par les routes incertaines Vers ce seuil du rêve...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
Viens dans le parc nocturne où dorment les fontaines, Mon amour ! Ne crains pas ce qu’on voit dans la nuit, Et ne frissonne plus parce qu’un vent fortuit A troublé la forêt sous ses voûtes lointaines. Laisse-moi te mener. Dans les miennes tes mains Sont un fardeau...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
Etouffant en la nuit la rumeur de ses pas Le vieux ménétrier sous l'horreur de la lune Rôde comme un garou par la lande et la dune. Sur la grève des mers il balance ses pas, Pris d'un doux mal d'amour pour sa dame la lune Qui le leurre au plus loin de la lande et la...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
Au temps de la mort des marjolaines, Alors que bourdonne ton léger Rouet, tu me fais, les soirs, songer A tes aïeules les châtelaines. Tes doigts sont fluets comme les leurs Qui dévidaient les fuseaux fragiles. Que files-tu, sœur, en ces vigiles, Où tu chantes d'heurs...
19ème siècle, Poèmes, Stuart Merrill
Mon âme, en une rose, Est morte de douleur : C'est l'histoire morose Du rêve et de la fleur. Je n'irai pas la dire Sur les routes du roi ; Je crois, Dame et Messire, Que vous ririez de moi. Voici le vent d'automne Sur mon âme et les fleurs ; Et pourtant je m'étonne De...