Si vous cherchez des poèmes français pour souhaiter une bonne nuit à quelqu'un, vous êtes au bon endroit. Bien que l’art soit subjectif, j’ai tenté de sélectionner des poèmes incontournables en me basant sur mes préférences personnelles et leur présence dans plusieurs anthologies de la poésie française que j’ai pu lire.
Voici donc quelques beaux poèmes célèbres pour souhaiter une bonne nuit à votre douce moitié, un ami, un parent, un collègue...
Si vous ne trouvez pas votre bonheur sur cette page, vous pouvez aussi lire les plus beaux poèmes d'amour ainsi que les plus beaux poèmes sur le thème de la nuit sur ce site.

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Je t'aime… - Francis Jammes
(extrait)
Je t'aime. Laisse-moi te prendre dans mes bras…
La pluie luit au soleil sur les arbres du bois…
Laisse-moi t'endormir et tu m'endormiras.
L'oreiller d'un enfant - Marceline Desbordes-Valmore
(extrait)
Cher petit oreiller, doux et chaud sous ma tête,
Plein de plume choisie, et blanc, et fait pour moi !
Quand on a peur du vent, des loups, de la tempête,
Cher petit oreiller, que je dors bien sur toi !
Bonsoir tout le monde - Robert Desnos
— Couché dans ton lit
Entre tes draps,
Comme une lettre dans son enveloppe,
Tu t'imagines que tu pars
Pour un long voyage.
— Mais non, je n'imagine rien.
Je ne suis pas né d'hier
Je connais le sommeil et ses mystères
Je connais la nuit et ses ténèbres
Et je dors comme je vis.
Bonsoir - Auguste Lacaussade
La nuit étoilée et sereine
Descend ; et déjà, loin du bord,
Le vaisseau glisse et nous entraîne…
Penché sur le mouvant sabord,
Je suis la barque fugitive
Qui vous reconduit vers la rive,
Vous que mes yeux voudraient revoir !
Mais la houle est vaste et profonde ;
La barque a disparu sur l’onde :
Bonsoir, ô mes frères, bonsoir !
Le vaisseau fuit, le vent se lève ;
Au large, au large, il suit son cours.
Des flots, par instants, sur la grève,
J’entends les bruits lointains et sourds.
Le jeune ami de mon jeune âge
Sur les rocs déserts du rivage
En pleurant est venu s’asseoir.
Aux clartés pâles des étoiles
Il voit au loin blanchir nos voiles :
Bonsoir, mon triste ami, bonsoir !
De mon seul appui dans ce monde
J’ai donc quitté le toit si cher !
Et me voilà, roulant sur l’onde,
Seul sur la vaste, vaste mer !
Là-bas, qui m’aimera comme elle ?
Vierge à l’angoisse maternelle,
Pardonnez-moi son désespoir !
C’est vous que sur les mers on prie :
Consolez-la, Vierge Marie !
Bonsoir, ô ma mère, bonsoir !
Hélas ! un compagnon fidèle,
Mon chien hurle et me cherche en vain ;
Ma sœur à ses côtés l’appelle :
Il vient se coucher sous sa main.
Léchant la main qui le caresse,
Sa morne et muette tendresse
Semble parler dans son œil noir !
Assise au seuil de ma demeure,
Ma sœur se tait, mais elle pleure :
Bonsoir, ma pauvre sœur, bonsoir !
Oiseau pêcheur, vers le rivage
Tu reviens au coucher du jour ;
Tu vas retrouver sur la plage
Et ton nid d’algue et ton amour.
Tandis que l’ombre t’y ramène,
Vers d’autres cieux le vent m’entraîne.
Sur ces bords, mon natal espoir,
Porte ma plainte et ma tristesse :
Comme il s’éloigne avec vitesse !
Bonsoir, heureux oiseau, bonsoir !
Et des monts les sommets sublimes
Déjà sont voilés à mes yeux.
Pics abaissés des hautes cimes,
Recevez mes derniers adieux !
Quand le soleil sur cette terre
Demain luira, fils solitaire,
Hélas ! je ne pourrai plus voir
Le ciel si bleu de la patrie :
Adieu donc, mon île chérie !
Bonsoir, ô mon pays, bonsoir !
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Bonsoir madame la Lune - Anonyme
Bonsoir madame la Lune
Que faites-vous donc là ?
J'fais mûrir des prunes
Pour tous ces enfants-là.
Bonjour monsieur le Soleil
Que faites-vous donc là ?
J'fais mûrir des groseilles
Pour tous ces enfants-là.
Mon rêve familier - Paul Verlaine
Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant
D'une femme inconnue, et que j'aime, et qui m'aime,
Et qui n'est, chaque fois, ni tout à fait la même
Ni tout à fait une autre, et m'aime et me comprend.
Car elle me comprend, et mon cœur transparent
Pour elle seule, hélas ! Cesse d'être un problème
Pour elle seule, et les moiteurs de mon front blême,
Elle seule les sait rafraîchir, en pleurant.
Est-elle brune, blonde ou rousse ? Je l'ignore.
Son nom ? Je me souviens qu'il est doux et sonore,
Comme ceux des aimés que la Vie exila.
Son regard est pareil au regard des statues,
Et, pour sa voix, lointaine, et calme, et grave, elle a
L'inflexion des voix chères qui se sont tues.
Nous dormirons ensemble - Louis Aragon
Que ce soit dimanche ou lundi
Soir ou matin minuit midi
Dans l'enfer ou le paradis
Les amours aux amours ressemblent
C'était hier que je t'ai dit
Nous dormirons ensemble
C'était hier et c'est demain
Je n'ai plus que toi de chemin
J'ai mis mon cœur entre tes mains
Avec le tien comme il va l'amble
Tout ce qu'il a de temps humain
Nous dormirons ensemble
Mon amour ce qui fut sera
Le ciel est sur nous comme un drap
J'ai refermé sur toi mes bras
Et tant je t'aime que j'en tremble
Aussi longtemps que tu voudras
Nous dormirons ensemble.
J’ai tant rêvé de toi - Robert Desnos
J’ai tant rêvé de toi que tu perds ta réalité.
Est-il encore temps d’atteindre ce corps vivant
et de baiser sur cette bouche la naissance
de la voix qui m’est chère ?
J’ai tant rêvé de toi que mes bras habitués en étreignant ton ombre
à se croiser sur ma poitrine ne se plieraient pas
au contour de ton corps, peut-être.
Et que, devant l’apparence réelle de ce qui me hante
et me gouverne depuis des jours et des années
je deviendrais une ombre sans doute,
Ô balances sentimentales.
J’ai tant rêvé de toi qu’il n’est plus temps sans doute que je m’éveille.
Je dors debout, le corps exposé à toutes les apparences de la vie
et de l’amour et toi, la seule qui compte aujourd’hui pour moi,
je pourrais moins toucher ton front et tes lèvres que les premières lèvres
et le premier front venu.
J’ai tant rêvé de toi, tant marché, parlé, couché avec ton fantôme
qu’il ne me reste plus peut-être, et pourtant,
qu’à être fantôme parmi les fantômes et plus ombre cent fois
que l’ombre qui se promène et se promènera allègrement
sur le cadran solaire de ta vie.
Nos étoiles - Guillaume Apollinaire
La trompette sonne et résonne,
Sonne l'extinction des feux.
Mon pauvre cœur, je te le donne
Pour un regard de tes beaux yeux.
Et c'est l'heure, tout s'endort,
J'écoute ronfler la caserne,
Le vent qui souffle vient du Nord,
La lune me sert de lanterne
Un chien perdu crie à la mort.
La nuit s'écoule, lente, lente,
Les heures sonnent lentement
Toi, que fais-tu, belle indolente
Tandis que veille ton amant
Qui soupire après son amante,
Et je cherche au ciel constellé
Où sont nos étoiles jumelles
Mon destin au tien est mêlé
Mais nos étoiles où sont-elles ?
Ô ciel, mon joli champ de blé….
Hugo l'a dit célèbre image
Booz et Ruth s'en vont là-haut
Pas au plafond sur le passage
Comme au roman de Balao
Duquel je n'ai lu qu'une page
Un coq lance « cocorico »
Ensemble nos chevaux hennissent
A Nice me répond l'Echo
Tous les amours se réunissent
Autour de mon petit Lou de Co
L'inimaginable tendresse
De ton regard parait aux cieux
Mon lit ressemble à ta caresse
Par la chaleur puisque tes yeux
Au nom de Nice m'apparaissent
La nuit s'écoule doucement
Je vais enfin dormir tranquille
Tes yeux qui veillent ton amant
Sont-ce pas ma belle indocile
Nos étoiles au firmament
Au crépuscule - Maurice Rollinat
Le soir, couleur cendre et corbeau,
Verse au ravin qui s’extasie
Sa solennelle poésie
Et son fantastique si beau.
Soudain, sur l’eau morte et moisie
S’allume, comme un grand flambeau
Qui se lève sur un tombeau,
La lune énorme et cramoisie.
Et, tandis que dans l’air sanglant,
Tout sort de l’ombre : moulin blanc,
Pont jauni, verte chènevière,
On voit entre les nénuphars
Moitié rouges, moitié blafards,
Flotter l’âme de la rivière.
Reste. N’allume pas la lampe - Catulle Mendès
Reste. N'allume pas la lampe. Que nos yeux
S'emplissent pour longtemps de ténèbres, et laisse
Tes bruns cheveux verser la pesante mollesse
De leurs ondes sur nos baisers silencieux.
Nous sommes las autant l'un que l'autre. Les cieux
Pleins de soleil nous ont trompés. Le jour nous blesse.
Voluptueusement berçons notre faiblesse
Dans l'océan du soir morne et délicieux.
Lente extase, houleux sommeil exempt de songe,
Le flux funèbre roule et déroule et prolonge
Tes cheveux où mon front se pâme enseveli…
Ô calme soir, qui hais la vie et lui résistes,
Quel long fleuve de paix léthargique et d'oubli
Coule dans les cheveux profonds des brunes tristes.
La Sérénade - Sophie d'Arbouville
Mère, quel doux chant me réveille ?
Minuit ! c'est l'heure où l'on sommeille.
Qui peut, pour moi, venir si tard
Veiller et chanter à l'écart ?
Dors, mon enfant, dors ! c'est un rêve.
En silence la nuit s'achève,
Mon front repose auprès du tien,
Je l'embrasse et je n'entends rien.
Nul ne donne de sérénade
À toi, ma pauvre enfant malade !
Ô mère ! ils descendent des cieux,
Ces sons, ces chants harmonieux ;
Nulle voix d'homme n'est si belle,
Et c'est un ange qui m'appelle !
Le soleil brille, il m'éblouit...
Adieu, ma mère, bonne nuit !
Le lendemain, quand vint l'aurore,
La blanche enfant dormait encore ;
Sa mère l'appelle en pleurant,
Nul baiser n'éveille l'enfant...
Son âme s'était envolée
Quand les chants l'avaient appelée.
Quand ce soir tu t'endormiras - Anna de Noailles
Quand ce soir tu t'endormiras
Loin de moi, pour ta triste nuit,
En songe pose sur mon bras
Ton beau col alourdi d'ennui.
Jette vers moi ce qui t'encombre,
Défais-toi des mornes pensées,
Je les ramasserai dans l'ombre
Comme une glaneuse insensée,
Ivre d'amour, et qui dénombre
Des roses, des lys, des pensées...
Le Poisson sans-souci - Robert Desnos
Le poisson sans-souci
Vous dit bonjour vous dit bonsoir
Ah ! qu'il est doux qu'il est poli
Le poisson sans-souci.
Il ne craint pas le mois d'avril
Et tant pis pour le pêcheur
Adieu l'appât adieu le fil
Et le poisson cuit dans le beurre.
Quand il prend son apéritif
à Conflans Suresnes ou Charenton
Les remorqueurs brûlant le charbon de Cardiff
Ne dérangeraient pas ce buveur de bon ton.
Car il a voyagé dans des tuyaux de plomb
Avant de s'endormir sur des pierres d'évier
Où l'eau des robinets chante pour le bercer
Car il a voyagé aussi dans des flacons
Que les courants portaient vers des rives désertes
Avec l'adieu naufragé à ses amis.
Le poisson sans-souci
Qui dit bonjour qui dit bonsoir
Ah ! qu'il est doux et poli
Le poisson sans-souci
Le souci sans souci
Le Poissy sans Soissons
Le saucisson sans poids
Le poisson sans-souci.
Il pleut, il pleut, bergère - Philippe Fabre d'Églantine
Il pleut, il pleut, bergère,
Presse tes blancs moutons,
Allons sous ma chaumière,
Bergère, vite, allons.
J'entends sur le feuillage
L'eau qui tombe à grand bruit ;
Voici, voici l'orage,
Voici l'éclair qui luit.
Bonsoir, bonsoir, ma mère,
Ma sœur Anne, bonsoir !
J'amène ma bergère
Près de nous pour ce soir.
Va te sécher, ma mie,
Auprès de nos tisons.
Sœur, fais-lui compagnie ;
Entrez, petits moutons.
Soupons : prends cette chaise,
Tu seras près de moi ;
Ce flambeau de mélèze
Brûlera devant toi :
Goûte de ce laitage ;
Mais tu ne manges pas ?
Tu te sens de l'orage ;
Il a lassé tes pas.
Eh bien, voici ta couche ;
Dors-y jusques au jour ;
Laisse-moi sur ta bouche
Prendre un baiser d'amour.
Ne rougis pas, bergère :
Ma mère et moi, demain,
Nous irons chez ton père
Lui demander ta main.
Dormeuse - Marceline Desbordes-Valmore
Si l'enfant sommeille,
Il verra l'abeille,
Quand elle aura fait son miel,
Danser entre terre et ciel.
Si l'enfant repose,
Un ange tout rose,
Que la nuit seule on peut voir,
Viendra lui dire : « Bonsoir. »
Si l'enfant est sage,
Sur son doux visage
La vierge se penchera,
Et longtemps lui parlera.
Si mon enfant m'aime,
Dieu dira lui-même :
J'aime cet enfant qui dort ;
Qu'on lui porte un rêve d'or.
Fermez ses paupières,
Et sur ses prières,
De mes jardins pleins de fleurs,
Faites glisser les couleurs.
Ourlez-lui des langes,
Avec vos doigts d'anges,
Et laissez sur son chevet
Pleuvoir votre blanc duvet.
Mettez-lui des ailes
Comme aux tourterelle,
Pour venir dans mon soleil
Danser jusqu'à son réveil !
Qu'il fasse un voyage,
Aux bras d'un nuage,
Et laissez-le, s'il lui plaît,
Boire à mes ruisseaux de lait !
Donnez-lui la chambre
De perles et d'ambre.
Et qu'il partage en dormant
Nos gâteaux de diamant !
Brodez-lui des voiles,
Avec mes étoiles,
Pour qu'il navigue en bateau
Sur mon lac d'azur et d'eau !
Que la lune éclaire
L'eau pour lui plus claire,
Et qu'il prenne au lac changeant
Mes plus fins poissons d'argent !
Mais je veux qu'il dorme,
Et qu'il se conforme
Au silence des oiseaux,
Dans leurs maisons de roseaux !
Car si l'enfant pleure,
On entendra l'heure
Tinter partout qu'un enfant
A fait ce que Dieu défend !
L'écho de la rue,
Au bruit accourue,
Quand l'heure aura soupiré,
Dira : « L'enfant a pleuré ! »
Et sa tendre mère,
Dans sa nuit amère,
Pour son ingrat nourrisson
Ne saura plus de chanson !
S'il brame, s'il crie,
Par l'aube en furie
Ce cher agneau révolté
Sera peut-être emporté !
Un si petit être,
Par le toit, peut-être,
Tout en criant, s'en ira,
Et jamais ne reviendra !
Qu'il rôde en ce monde,
Sans qu'on lui réponde,
Jamais l'enfant que je dis
Ne verra mon paradis !
Oui ! mais s'il est sage,
Sur son doux visage
La vierge se penchera
Et longtemps lui parlera !
États - Jules Laforgue
Ah ! ce soir, j'ai le cœur mal, le cœur à la Lune !
Ô Nappes du silence, étalez vos lagunes ;
Ô toits, terrasses, bassins, colliers dénoués
De perles, tombes, lys, chats en peine, louez
La Lune, notre Maîtresse à tous, dans sa gloire :
Elle est l'Hostie ! et le silence est son ciboire !
Ah ! qu'il fait bon, oh ! bel et bon, dans le halo
De deuil de ce diamant de la plus belle eau !
Ô Lune, vous allez me trouver romanesque,
Mais voyons, oh ! seulement de temps en temps est-c’que
Ce serait fol à moi de me dire, entre nous,
Ton Christophe Colomb, ô Colombe, à genoux ?
Allons, n'en parlons plus ; et déroulons l'office
Dés minuits, confits dans l'alcool de tes délices.
Ralentendo vers nous, ô dolente Cité,
Cellule en fibroïne aux organes ratés !
Rappelle-toi les centaures, les villes mortes,
Palmyre, et les sphinx camards des Thèbe aux cent portes ;
Et quelle Gomorrhe a sous ton lac de Léthé
Ses catacombes vers la stérile Astarté !
Et combien l'homme, avec ses relatifs " Je t'aime ",
Est trop anthropomorphe au-delà de lui-même,
Et ne sait que vivotter comm' ça des bonjours
Aux bonsoirs tout en s'arrangeant avec l'Amour.
- Ah ! Je vous disais donc, et cent fois plutôt qu'une,
Que j'avais le cœur mal, le cœur bien à la Lune.
Soir d'été - Marceline Desbordes-Valmore
Le soleil brûlait l'ombre, et la terre altérée
Au crépuscule errant demandait un peu d'eau ;
Chaque fleur de sa tête inclinait le fardeau
Sur la montagne encor dorée.
Tandis que l'astre en feu descend et va s'asseoir
Au fond de sa rouge lumière,
Dans les arbres mouvants frissonne la prière,
Et dans les nids : " Bonsoir ! Bonsoir ! "
Pas une aile à l'azur ne demande à s'étendre,
Pas un enfant ne rôde aux vergers obscurcis,
Et dans tout ce grand calme et ces tons adoucis
Le moucheron pourrait s'entendre.
Adieux au monde - Gabriel Charles, abbé de Lattaignant
J'aurai bientôt quatre-vingts ans :
Je crois qu'à cet âge il est temps
De dédaigner la vie.
Aussi je la perds sans regret,
Et je fais gaîment mon paquet ;
Bonsoir la compagnie !
J'ai goûté de tous les plaisirs ;
J'ai perdu jusques aux désirs ;
A présent je m'ennuie.
Lorsque l'on n'est plus bon à rien,
On se retire, et l'on fait bien ;
Bonsoir la compagnie !
Lorsque d'ici je partirai,
Je ne sais pas trop où j'irai ;
Mais en Dieu je me fie :
Il ne peut me mener que bien ;
Aussi je n'appréhende rien :
Bonsoir la compagnie !
Dieu nous fit sans nous consulter
Rien ne saurait lui résister ;
Ma carrière est remplie.
À force de devenir vieux,
Peut-on se flatter d'être mieux ?
Bonsoir la compagnie !
Nul mortel n'est ressuscité,
Pour nous dire la vérité
Des biens d'une autre vie.
Une profonde obscurité
Est le sort de l'humanité ;
Bonsoir la compagnie !
Rien ne périt entièrement,
Et la mort n'est qu'un changement,
Dit la philosophie.
Que ce système est consolant !
Je chante, en adoptant ce plan ;
Bonsoir la compagnie !
Lorsque l'on prétend tout savoir,
Depuis le matin jusqu'au soir,
On lit, on étudie ;
On n'en devient pas plus savant ;
On n'en meurt pas moins ignorant ;
Bonsoir la compagnie !
Rêves - Poser sa tête sur un oreiller - Robert Desnos
Poser sa tête sur un oreiller
Et sur cet oreiller dormir
Et dormant rêver
À des choses curieuses ou d'avenir,
Rêvant croire à ce qu'on rêve
Et rêvant garder la notion
De la vie qui passe sans trêve
Du soir à l'aube sans rémission.
Ceci est presque normal,
Ceci est presque délicieux
Mais je plains ceux
Qui dorment vite et mal,
Et, mal éveillés, rêvent en marchant.
Ainsi j'ai marché autrefois,
J'ai marché, agi en rêvant,
Prenant les rues pour les allées d'un bois.
Une place pour les rêves
Mais les rêves à leur place.
La nuit - Anna de Noailles
Nuit sainte, les amants ne vous ont pas connue
Autant que les époux. C’est le mystique espoir
De ceux qui tristement s’aiment de l’aube au soir,
D’être ensemble enlacés sous votre sombre nue.
Comme un plus ténébreux et profond sacrement,
Ils convoitent cette heure interdite et secrète
Où l’animale ardeur s’avive et puis s’arrête
Dans un universel et long apaisement.
C’est le vœu le plus pur de ces pauvres complices
Dont la tendre unité ne doit pas s’avouer,
De surprendre parfois votre austère justice,
Et d’endormir parmi votre ombre protectrice
Leur amour somptueux, humble et désapprouvé…
Insomnie - Tristan Corbière
Insomnie, impalpable Bête !
N'as-tu d'amour que dans la tête ?
Pour venir te pâmer à voir,
Sous ton mauvais œil, l'homme mordre
Ses draps, et dans l'ennui se tordre !...
Sous ton œil de diamant noir.
Dis : pourquoi, durant la nuit blanche,
Pluvieuse comme un dimanche,
Venir nous lécher comme un chien :
Espérance ou Regret qui veille.
A notre palpitante oreille
Parler bas... et ne dire rien ?
Pourquoi, sur notre gorge aride,
Toujours pencher ta coupe vide
Et nous laisser le cou tendu,
Tantales, soiffeurs de chimère :
- Philtre amoureux ou lie amère
Fraîche rosée ou plomb fondu ! -
Insomnie, es-tu donc pas belle ?...
Eh pourquoi, lubrique pucelle,
Nous étreindre entre tes genoux ?
Pourquoi râler sur notre bouche,
Pourquoi défaire notre couche,
Et... ne pas coucher avec nous ?
Pourquoi, Belle-de-nuit impure,
Ce masque noir sur ta figure ?...
- Pour intriguer les songes d'or ?...
N'es-tu pas l'amour dans l'espace,
Souffle de Messaline lasse,
Mais pas rassasiée encor !
Insomnie, es-tu l'Hystérie...
Es-tu l'orgue de barbarie
Qui moud l'Hosannah des Élus ?...
- Ou n'es-tu pas l'éternel plectre,
Sur les nerfs des damnés-de-lettre,
Raclant leurs vers - qu'eux seuls ont lus.
Insomnie, es-tu l'âne en peine
De Buridan - ou le phalène
De l'enfer ? - Ton baiser de feu
Laisse un goût froidi de fer rouge...
Oh ! viens te poser dans mon bouge ! ...
Nous dormirons ensemble un peu.
Endormons-nous - Charles Cros
Endormons-nous, petit chat noir.
Voici que j’ai mis l’éteignoir
Sur la chandelle.
Tu vas penser à des oiseaux
Sous bois, à de félins museaux...
Moi rêver d’Elle.
Nous n’avons pas pris de café,
Et, dans notre lit bien chauffé
(Qui veille pleure.)
Nous dormirons, pattes dans bras.
Pendant que tu ronronneras,
J’oublierai l’heure.
Sous tes yeux fins, appesantis,
Reluiront les oaristys
De la gouttière.
Comme chaque nuit, je croirai
La voir, qui froide a déchiré
Ma vie entière.
Et ton cauchemar sur les toits
Te dira l’horreur d’être trois
Dans une idylle.
Je subirai les yeux railleurs
De son faux cousin, et ses pleurs
De crocodile.
Si tu t’éveilles en sursaut
Griffé, mordu, tombant du haut
Du toit, moi-même
Je mourrai sous le coup félon
D’une épée au bout du bras long
Du fat qu’elle aime.
Puis, hors du lit, au matin gris,
Nous chercherons, toi, des souris
Moi, des liquides
Qui nous fassent oublier tout,
Car, au fond, l’homme et le matou
Sont bien stupides.
Le Repos du soir - Pierre Dupont
Quand le soleil se couche horizontal,
De longs rayons noyant la plaine immense,
Comme un blé mûr, le ciel occidental
De pourpre vive et d’or pur se nuance ;
L’ombre est plus grande et la clarté s’éteint
Sur le versant des pentes opposées ;
Enfin, le ciel, par degrés, se déteint,
Le jour s’efface en des brumes rosées.
Reposons-nous !
Le repos est si doux :
Que la peine sommeille
Jusqu’à l’aube vermeille !
Dans le sillon, la charrue, au repos,
Attend l’aurore et la terre mouillée ;
Bergers, comptez et parquez les troupeaux,
L’oiseau s’endort dans l’épaisse feuillée.
Gaules en main, bergères, aux doux yeux,
À l’eau des gués mènent leurs bêtes boire ;
Les laboureurs vont délier les bœufs,
Et les chevaux soufflent dans la mangeoire.
Reposons-nous !
Le repos est si doux :
Que la peine sommeille
Jusqu’à l’aube vermeille !
Tous les fuseaux s’arrêtent dans les doigts,
La lampe brille, une blanche fumée
Dans l’air du soir monte de tous les toits ;
C’est du repas l’annonce accoutumée.
Les ouvriers, si las, quand vient la nuit,
Peuvent partir ; enfin, la cloche sonne,
Ils vont gagner leur modeste réduit,
Où, sur le feu, la marmite bouillonne.
Reposons-nous !
Le repos est si doux :
Que la peine sommeille
Jusqu’à l’aube vermeille !
La ménagère et les enfants sont là,
Du chef de l’âtre attendant la présence :
Dès qu’il paraît, un grand cri : « Le voilà ! »
S’élève au ciel, comme en réjouissance ;
De bons baisers, la soupe, un doigt de vin,
Rendent la joie à sa figure blême ;
Il peut dormir, ses enfants ont du pain,
Et n’a-t-il pas une femme qui l’aime ?
Reposons-nous !
Le repos est si doux :
Que la peine sommeille
Jusqu’à l’aube vermeille !
Tous les foyers s’éteignent lentement ;
Dans le lointain, une usine, qui fume,
Pousse de terre un sourd mugissement ;
Les lourds marteaux expirent sur l’enclume.
Ah ! détournons nos âmes du vain bruit,
Et nos regards du faux éclat des villes :
Endormons-nous sous l’aile de la nuit
Qui mène en rond ses étoiles tranquilles !
Reposons-nous !
Le repos est si doux :
Que la peine sommeille
Jusqu’à l’aube vermeille !
L’Insomnie - Marceline Desbordes-Valmore
Je ne veux pas dormir. Ô ma chère insomnie !
Quel sommeil aurait ta douceur ?
L’ivresse qu’il accorde est souvent une erreur,
Et la tienne est réelle, ineffable, infinie.
Quel calme ajouterait au calme que je sens ?
Quel repos plus profond guérirait ma blessure ?
Je n’ose pas dormir ; non, ma joie est trop pure ;
Un rêve en distrairait mes sens.
Il me rappellerait peut-être cet orage
Dont tu sais enchanter jusques au souvenir ;
Il me rendrait l’effroi d’un douteux avenir,
Et je dois à ma veille une si douce image !
Un bienfait de l’Amour a changé mon destin :
Oh ! qu’il m’a révélé de touchantes nouvelles !
Son message est rempli ; je n’entends plus ses ailes :
J’entends encor : demain, demain !
Berce mon âme en son absence,
Douce insomnie, et que l’Amour
Demain me trouve, à son retour,
Riante comme l’espérance.
Pour éclairer l’écrit qu’il laissa sur mon cœur,
Sur ce cœur qui tressaille encore,
Ma lampe a ranimé sa propice lueur,
Et ne s’éteindra qu’à l’aurore.
Laisse à mes yeux ravis briller la vérité ;
Écarte le sommeil, défends-moi de tout songe :
Il m’aime, il m’aime encore ! Ô Dieu ! pour quel mensonge
Voudrais-je me soustraire à la réalité ?
A la nuit - Évariste de Forges de Parny
Toujours le malheureux t'appelle,
Ô nuit, favorable aux chagrins !
Viens donc, et, porte sur ton aile
L'oubli des perfides humains.
Voile ma douleur solitaire ;
Et, lorsque la main du Sommeil
Fermera ma triste paupière,
Ô dieux ! reculez mon réveil ;
Qu'à pas lents l'aurore s'avance
Pour ouvrir les portes du jour :
Importuns, gardez le silence,
Et laissez dormir mon amour.
J’espère de cette sélection de poèmes vous a plus. N'hésitez pas à en envoyer un aux personnes que vous appréciez pour leur souhaiter une bonne nuit en poésie.
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