Si vous souhaitez lire ou relire les poèmes les plus célèbres et les plus beaux de Rutebeuf, vous êtes au bon endroit. Bien que l’art soit subjectif, j’ai tenté de sélectionner des poèmes incontournables de ce poète en me basant sur mes préférences personnelles et leur présence dans plusieurs anthologies de la poésie française que j’ai pu lire.
Rutebeuf (1230-1285) est un poète français du Moyen Âge. Son oeuvre rompt avec la poésie lyrique traditionnelle de l'époque. Il écrit des poèmes polémiques et satiriques et est un des premiers à partager ses misères. Il est aussi passé à l'histoire grâce à la chanson Pauvre Rutebeuf de Léo Ferré.
Que sont mes amis devenus, ou La complainte, est le poème le plus célèbre de Rutebeuf. Il a pour thème le départ et la perte d'êtres chers et se compose de 4 neuvains alternant 2 octosyllabes et 1 tétrasyllabe. La chanson Pauvre Rutebeuf de Léo Ferré reprend en partie le texte de La complainte.
Voici le meilleur de la poésie de Rutebeuf.
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La Complainte - Rutebeuf
Que sont mes amis devenus ;
Que j'avais de si près tenus…
Et tant aimés.
Ils ont été trop clairsemés,
Je crois le vent les a ôtés.
L'amour est morte.
Ce sont amis que vent me porte
Et il ventait devant ma porte ;
Les emporta.
Avec le temps qu'arbre défeuille
Quand il ne reste en branche feuille
Qui n'aille à terre…
Avec pauvreté qui m'atterre
Qui de partout me fait la guerre
Au temps d'hiver.
Ne convient pas que vous raconte
Comment je me suis mis à honte,
En quelle manière.
Que sont mes amis devenus ;
Que j'avais de si près tenus…
Et tant aimés.
Ils ont été trop clairsemés,
Je crois le vent les a ôtés.
L'amour est morte.
Le mal ne sait pas seul venir.
Tout ce qui m'était à venir…
M'est advenu.
Pauvre sens et pauvre mémoire ;
M'a Dieu donné, le roi de gloire.
Et pauvre rente…
Et droit au cul quand bise vente.
Le vent me vient, le vent m'évente.
L'amour est morte.
Ce sont amis que vent emporte
Et il ventait devant ma porte ;
Les emporta.
La grièche d’hiver - Rutebeuf
Quand vient le temps qu’arbre défeuille
quand il ne reste en branche feuille
qui n’aille à terre,
par la pauvreté qui m’atterre,
qui de toutes parts me fait guerre,
près de l’hiver,
combien se sont changés mes vers,
mon dit commence trop divers
de triste histoire.
Peu de raison, peu de mémoire
m’a donné Dieu, le roi de gloire,
et peu de rentes,
et froid au cul quand bise vente :
le vent me vient, le vent m’évente
et trop souvent
je sens venir et revenir le vent.
La grièche m’a promis autant
qu’elle me livre :
elle me paie bien et bien me sert,
contre le sou me rend la livre
de grand misère.
La pauvreté m’est revenue,
toujours m’en est la porte ouverte,
toujours j’y suis
et jamais je ne m’en échappe.
Par pluie mouillé, par chaud suant :
Ah le riche homme !
Je ne dors que le premier somme.
De mon avoir, ne sais la somme
car je n’ai rien.
Dieu m’a fait le temps bien propice :
noires mouches en été me piquent,
en hiver blanches.
Je suis comme l’osier sauvage
ou comme l’oiseau sur la branche ;
l’été je chante,
l’hiver je pleure et me lamente
et me défeuille ainsi que l’arbre
au premier gel.
En moi n’ai ni venin ni fiel :
ne me reste rien sous le ciel,
tout passe et va.
Les enjeux que j’ai engagés
m’ont ravi tout ce que j’avais
et fourvoyé
et entraîné hors de ma voie.
J’ai engagé des enjeux fous,
je m’en souviens.
Or, bien le vois, tout va, tout vient:
tout venir, tout aller convient
hors les bienfaits.
Les dés que les détiers ont faits
m’ont dépouillé de mes habits ;
les dés m’occient,
les dés me guettent et m’épient,
les dés m’assaillent et me défient,
cela m’accable.
Je n’en puis rien si je m’effraie :
ne vois venir avril et mai,
voici la glace.
Or j’ai pris le mauvais chemin;
les trompeurs de basse origine
m’ont mis sans robe.
Le monde est tout rempli de ruse,
et qui ruse le plus s’en vante ;
moi qu’ai-je fait
qui de pauvreté sens le faix ?
Grièche ne me laisse en paix,
me trouble tant,
et tant m’assaille et me guerroie ;
jamais ne guérirai ce mal
par tel chemin.
J’ai trop été en mauvais lieux ;
les dés m’ont pris et enfermé :
je les tiens quittes!
Fol est qui leur conseil habite ;
de sa dette point ne s’acquitte
mais bien s’encombre,
de jour en jour accroît le nombre.
En été il ne cherche l’ombre
ni chambre fraîche
car ses membres sont souvent nus :
il oublie du voisin la peine
mais geint la sienne.
La grièche l’a attaqué,
l’a dépouillé en peu de temps
et nul ne l’aime.
Mort de Rutebeuf
Renoncer me faut à rimer
et je me dois moult étonner
quand j’ai pu faire si longtemps.
Bien me doit le cœur larmoyer
que jamais ne me pus plier
à Dieu servir parfaitement.
Mais j’ai mis mon entendement
en jeu et en ébattements,
qu’ainsi ne daignai psalmodier ;
si pour moi n’est au jugement
celle où Dieu prit sombrement
mal marché pris au paumoyer.
Tard serai mès au repentir.
Las moi qu’onques ne sut sentir
mon fol cœur quelle est repentance,
n’a bien faire lui assentir.
Comment oseraie tentir
quand nés les justes auront doutance ?
J’ai toujours engraissé ma panse
d’autrui cheptel, d’autrui substance.
Ci a bon clerc au mieux mentir :
si je dis : « C’est par ignorance
que je ne sais qu’est pénitence »,
ce me peut pas garantir…
Garantir ! En quelle manière ?
Ne me fit Dieu bonté entière,
Qui me donna sens et savoir,
Et me fit à sa forme fière ?
Encor me fit bonté plus chère :
Pour moi voulut mort recevoir.
Sens me donna de décevoir
L’ennemi qui me veut avoir
Et mettre en sa prison dernière,
Là d’où nul ne se peut ravoir :
Pour prière ne pour avoir,
N’en vois nul qui revienne arrière.
J’ai fait au corps sa volonté,
j’ai fait rimes et j’ai chanté
sur les uns pour aux autres plaire,
dont ennemi m’a enchanté
et m’âme mise en orphenté
pour mener au félon repaire.
Si celle en qui tout bien reclaire
ne prend en cure mon affaire,
de male rente m’a renté
mon cœur, où tant trou’ de contraire :
physicien n’apothicaire
ne me peuvent donner santé.
Je sais une physicienne
Que ce soit à Lyon ou Vienne
Et autant que le siècle dure,
N’a si bonne chirurgienne,
N’est plaie, tant soit ancienne,
Qu’elle ne nettoie et n’écure,
Pour peu qu’elle y mette sa cure.
Elle expurgea de vie obscure
La très benoîte Égyptienne ;
À Dieu la rendit nette et pure :
Puisque c’est vrai, mette en sa cure,
Ma lasse d’âme chrétienne.
Puisque mourir vois faible et fort,
Comment prendrai-je confiance
Que de mort me puisse défendre ?
N’en vois nul, si grand force ait-il,
Qui des pieds ne perde l’appui :
A terre faut le corps étendre.
Que puis-je, hors la mort attendre ?
La mort ne laisse dur ni tendre,
Quelque richesse qu’on lui porte,
Et, quand le corps est mis en cendre,
A Dieu faut-il rendre raison
De ce qu’on fit jusqu’à la mort.
J’ai tant fait que plus je ne puis ;
Aussi me faut tenir en paix :
Dieu veuille que ne soit trop tard !
Tous les jours j’ai accru mon faix,
Et chacun dit, clerc ou laïque :
« Plus le feu couve, plus il brûle. »
J’ai pensé engeigner Renard :
Rien n’y valent engins ni arts,
Tranquille il est en son palais.
Pour ce siècle qui se finit,
Il m’en faut partir d’autre part :
Nul n’y peut rien, je l’abandonne.
J’espère de cette sélection des poèmes les plus beaux et les plus connus de Rutebeuf vous a plu. Pour découvrir plus d’œuvres de ce poète sur Poetica Mundi, n’hésitez pas à utiliser le lien ci-dessous.
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